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“The Silent Clowns”, sublime parade

Dernière mise à jour : septembre 29th, 2020 at 11:39 am

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Walter Kerr ne perçoit la comédie burlesque muette ni sous l’angle de la nostalgie, ni comme terreau propice aux anecdotes. Il se penche sur le sujet avec une pleine appréciation du merveilleux et des nuances qu’il recèle. Il en projette le plaisir pour nous.

Walter Kerr perceives silent screen comedy neither as nostalgia nor as a looting ground for anecdote. He comes to it with a full appreciation of its wonder and nuance. He projects its pleasures for us.
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La portée et le brio du point de vue de Walter Kerr font de “The Silent Clowns” une œuvre pleine et de la plus forte originalité, un des ouvrages les plus passionnants sur les comédies américaines burlesques de la période du muet, à ranger avec le diptyque de Petr Kràl “Le burlesque ou Morale de la tarte à la crème” et “Les burlesques ou Parade des somnambules”.

Divisé en quatre parties qui couvrent chronologiquement l’histoire du genre, chacun des 37 chapitres est consacré à un “clown”, avec une certaine prédilection pour les trois grands : Charlie Chaplin, Buster Keaton et Harold Lloyd. Kerr analyse leurs styles, leurs obsessions récurrentes et leurs évolutions respectives vers l’inévitable fin du muet, ce qu’il surnomme la “danse du crépuscule” (“The Twilight Dance”, titre de la quatrième partie). Voici trois extraits issus du livre :

Sur Chaplin :
“Il n’est pas un simple vagabond… A l’instant où il souhaite devenir un boxeur, il en devient un extraordinairement adroit. A l’instant où il souhaite faire du rollers, il devient un Nijinsky sur roues… s’il souhaite parier, il est aussitôt un requin… s’il est présenté comme un soldat, il peut capturer l’Empereur… Le secret de Chaplin, en tant que personnage, est qu’il peut être n’importe qui… Le secret est dévastateur. Car un homme qui peut, d’un claquement de doigts ou d’un clignement de sourcils, se transformer instantanément en absolument n’importe qui est un homme qui, dans son cœur, n’est personne.”

Sur Keaton :
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“J’ai surnommé Keaton le plus muet des comédiens du muet… Le silence était lié à une autre qualité profondément ancrée en lui – cette immobilité, cette vigilance au repos que nous avons si souvent vues en lui. Keaton pouvait courir comme un lévrier, ce qu’il fit dans presque chaque film. Il pouvait réaliser des cascades aussi honnêtement et sans doute de façon plus dangereuse que Lloyd. Ses images étaient des images en mouvement. Or, bien qu’une tempête fasse rage en lui, et bien qu’il s’y débatte si souvent, Keaton vogue constamment vers le calme qui règne dans l’œil du cyclone.”

Sur Lloyd :
“Qu’était-il arrivé à ce jeune homme tenace mais aux débuts imitatifs et relativement peu inspirés pour le mener au sommet de la vague ? Travaillant dur, empruntant jusqu’à ses lunettes, laissant tomber la recherche d’une image comique plus grande et plus étrange que lui-même pour offrir à la place sa propre ambition opiniâtre en guise d’image, la chance de Lloyd vint enfin à tourner. Incapable de se créer une persona suffisamment bizarre et ambivalente pour fonctionner comme mythe, il finit par endosser, presque sans s’en rendre compte, à cause de qui il était et de ce qu’il était, une figure mythique qui existait déjà : celle du bon Américain.”

Le livre en lui-même est présenté dans une édition très prestigieuse avec un lettrage magnifique et plus de 400 images d’illustration. En résumé, une lecture qui s’impose pour tous ceux qui admirent encore les clowneries de nos chers clowns silencieux.

Sébou/세부

“The Silent Clowns” par Walter Kerr, publié par Alfred A. Knopf, 1975.
“Le Burlesque ou Morale de la tarte à la crème” par Petr Kràl, Stock, 1984.
“Les Burlesques ou Parade des Somnambules” par Petr Kràl, Stock, 1986.

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The range and brilliance of Walter Kerr’s perception make “The Silent Clowns” a work of the strongest originality, one of the most riveting book about American slapstick comedies of the silent era, along with Petr Kràl’s diptych “Le burlesque ou Morale de la tarte à la crème” and “Les burlesques ou Parade des somnambules”.
Divided in four part which runs chronologically throughout the genre’s history, each of the 37 chapters focuses on one “clown”, with a certain predilection for the three greatest: Charlie Chaplin, Buster Keaton and Harold Lloyd. Kerr analyses their styles, recurring obsessions and their own evolutions toward the inescapable end of the silent era, which the author calls “the twilight dance” (title of part four). Here are three extracts from the book:

On Chaplin:
“He is no natural tramp… The moment he wishes to become a boxer, he becomes an extraordinarily deft one. The moment he wishes to put on roller skates, he becomes Nijinsky on wheels… if he wishes to gamble, he is at once a shark… If he is inducted as a soldier, he can capture the Kaiser… The secret of Chaplin, as a character, is that he can be anyone… The secret is a devastating one. For the man who can, with the flick of a finger or the blink of an eyelash, instantly transform himself into absolutely anyone is a man who must, in his heart, remain no one.”

On Keaton:
“I have called Keaton the most silent of silent film comedians… The silence was related to another deeply rooted quality – that immobility, the sense of alert repose we have so often seen in him. Keaton could run like a jackrabbit, and, in almost every feature film, he did. He could stunt like Lloyd, as honestly and even more dangerously. His pictures are motion pictures. Yet, though there is a hurricane eternally raging about him, and though he is often fully caught up in it, Keaton’s constant drift is toward the quiet at the hurrican’s eye.”

On Lloyd:

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“What had happen to this tenacious, at first imitative, relatively uninspired young man to land him at the top of the heap? Laboring mightily, borrowing even his glasses, dropping the search for a comic image larger and stranger than himself to offer his own dogged ambition as image enough, Lloyd at last ran into luck. Unable to create for himself an outsized figure sufficiently bizarre and ambivalent to function as a myth, he fell, almost without thinking, and because of who and what he was, into a myth that already existed: the myth of the good American.”

The book itself is presented in a very prestigious edition with a beautiful lettering, and is illustrated with over 400 pictures. Simply put, a must-read for everyone still admire our beloved silent clowns’ clowning.

Sébou/세부

“The Silent Clowns” by Walter Kerr, published by Alfred A. Knopf, 1975.
“Le Burlesque ou Morale de la tarte à la crème” by Petr Kràl, Stock, 1984.
“Les Burlesques ou Parade des Somnambules” by Petr Kràl, Stock, 1986.

Sébastien Simon

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