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L'étoile du nord critique avis livre

Critique / “L’étoile du Nord” (2020) de D.B. John

Dernière mise à jour : décembre 15th, 2020 at 10:29 am

L’étoile du Nord est un roman d’espionnage de D.B. John sorti en poche chez Pocket en juillet 2020. L’écrivain britannique dresse un portrait de femmes entre la CIA et le Bowibu, la puissante police secrète nord-coréenne. La critique et l’avis

Cet article vous est proposé par un rédacteur-invité, le chroniqueur Chris L..

Synopsis :

Elle est espionne. Sa sœur jumelle a disparue. Il est général. Elle est criminelle. Leur point commun : un geste, un mot, et c’est la mort.

L’étoile du nord : un très bon roman d’espionnage

Une visite touristique en Corée du Nord est avant tout un hymne au culte du dirigeant en exercice,  un des membres de la dynastie Kim qui règne comme une véritable monarchie marxiste, sans partage, sur le Pays du matin frais depuis 1948. Ne se contentant pas de son circuit organisé en 2012 où tout est sans saveurs, standardisé, avec un contrôle de tous les instants, interdisant de communiquer avec la population, D.B. John, écrivain et journaliste gallois s’est plongé durant de longues années dans l’étude de cet étrange pays.

Ce travail méticuleux a donné naissance en 2018 à un très bon roman d’espionnage mais pas seulement. En effet, le lecteur découvre d’un peu plus près le quotidien de ce pays, du mode de vie des plus pauvres à celui des nantis, toujours sous la menace de la déchéance ou de la mort. 

Le ton est donné dès le prologue de L’étoile du nord, avec la disparition en 1998 sur une île de la Corée du Sud, près de la Ligne de limite du nord, d’une jeune femme et de son ami. En réalité il s’agit d’un enlèvement perpétué par des individus masqués en noir. Cependant, l’enquête rapidement menée conclut à leurs probables noyades. Aussitôt le livre d’Éric FayeÉclipses japonaise paru au Seuil en 2016, revient en mémoire.

En 2010, Jenna Williams, la trentaine, maître-assistante à l’Université de Georgetown, demeure convaincue que sa sœur jumelle est vivante. Afro américaine par son père et coréenne par sa mère, bilingue, sa thèse a porté sur la Corée. Ses compétences ont attiré les regards du Département d’Etat et de la CIA. Motivée et pugnace, elle suit une formation très musclée, à un rythme accéléré, pour devenir espionne. Digne de Lara Croft ou d’une James Bond girl, elle surmonte tous les obstacles et intègre la CIA sous le nom de Marianne.    

Pendant ce temps à Pyongyang, deux frères Yong-Ho et Cho-Ho gravissent les échelons qui les conduisent progressivement vers le cénacle entourant le Guide suprême, Kim Jong-il, encore appelé Guide suprême, Président éternel. Enfants adoptés, une enquête est ouverte sur la pureté de leurs géniteurs. Il faut s’assurer que leurs ancêtres ont été de respectables citoyens. La peur s’instille même s’ils  n’ont rien à se reprocher, sauf les petites magouilles menées par Yong qui pourraient avoir des conséquences désastreuses. Cho, colonel, mène une délégation nord coréenne aux Etats-Unis où il croise furtivement Jenna.

Une plume entrainante et vive

L’étoile du nord, c’est aussi l’occasion de découvrir les réprouvés qui vivent dans la province du Ryanggang, à la frontière de la Chine. Ils ne sont pas parqués dans des camps mais la vie y est difficile. Il s’agit de survivre dans des conditions misérables, sous l’œil vigilant du Bowibu, police secrète  à l’affut de tout opposant au régime. Moon, une femme de plus de soixante ans, se débat avec énergie en faisant du marché noir et en vendant des galettes à proximité de la gare. Combattante, protectrice, astucieuse, aimante, elle est le personnage le plus attachant de tout le roman.

Une fin digne des films hollywoodiens, où le spectaculaire l’emporte sur la réalité. L’étoile du nord est un livre fluide, porté par une plume entrainante et vive. Il ne se lâche pas, le lecteur étant pris à bras le corps par l’auteur qui déroule habilement toutes les horreurs et avanies que subit ce pays depuis des décennies. Les chapitres se succèdent entre Etats-Unis, avec le centre de formation de la CIA, et Pyongyang, avec ses hôtels pour étrangers, ses résidences pour privilégiés, et les masures du nord-est du pays, ou le camp numéro 22. Corruption, trafics mafieux, expériences médicales, exécutions, politiques de terreur, oppression, constituent un bilan effrayant pour cette dictature empreinte de paranoïa. D. B. John réussit une excellente entrée en littérature et son second opus est attendu avec impatience.

En savoir plus :

  • L’étoile du nord, D.B. John, POCKET, juillet 2020, 624 pages, 8,70 euros
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