Présentée au Théâtre du Chêne Noir, dans le cadre du Festival Off Avignon 2022, la pièce Les Passagers, écrit epar Frédéric Krivine — à qui l’on doit entre autres Un village français — et mis en scène par Laurent Capelluto, propose un face à face haletant sur fond de conflit israélo-palestinien. L’avis et la critique théâtre de Bulles de Culture.
Synopsis :
Quand Amina Lamdani (Axelle Maricq) passe les portes du commissariat, elle pense se rendre à un interrogatoire de routine. Mais David Stern (Emmanuel Salinger), le policier qui l’interroge, n’est pas pressé de la relâcher et déploie autour d’elle une toile de questions dans laquelle elle est prise au piège. Car Amina n’est pas là pour la routine, mais parce qu’on la soupçonne d’avoir joué un rôle dans l’attentat meurtrier d’un bus qui a eu lieu à Jérusalem un mois plus tôt.
Les Passagers, deux forces antagonistes dans un conflit miné
Deux personnages autour desquels nouer une intrigue serrée, deux personnages radicalement opposés : il est le policier qui convoque, elle est celle que l’on interroge ; il est Israélien, elle est Palestinienne. Le dialogue qui se noue entre eux est d’abord larvé par ces oppositions irréconciliables et la certitude que l’autre n’est pas fiable.
D’abord latente, la violence qui oppose les deux camps, incarnés chacun par un personnage, trouve vite une expression plus explicite dans les reproches, les accusations et l’impression réciproque que l’autre participe à la persécution qui vise son peuple, et dont il ou elle est plus ou moins directement victime.
Teinté tour à tour de mépris, de méfiance, d’arrogance ou de respect, l’affrontement verbal au cœur de la pièce de théâtre Les Passagers conduit le public de fausses en vraies révélations. Les impressions se vérifient ou se démentent ; les hypothèses se confirment ou s’infirment. Les convictions sautent et l’on se prend au jeu du suspens, de la tension palpable et des renversements successifs, où ce n’est plus l’un mais l’autre qui domine.
Les ravages de la violence
Un troisième personnage émerge, même s’il n’est pas sur scène : celui du terroriste, cet homme qui a sauvé Amina et que de toute évidence, elle connaissait ; il est au cœur des échanges entre les deux personnages, et l’on suit les progrès de l’enquête et de l’interrogatoire pour tenter de déceler sa personnalité, son caractère, ses motivations et la mystérieuse raison qui lui a fait laisser la vie sauve à cette femme qu’il ne connaissait presque pas.
Les Passagers interroge ainsi l’origine de la violence, notamment terroriste, et sa triste banalisation dans des territoires où elle est devenue légion. Difficile alors de prendre un parti définitif pour l’un ou l’autre camp, tant les justifications renvoyées dos à dos s’entendent ou se comprennent.
La mise en scène sobre et efficace de Laurent Capelluto magnifie l’émotion qui surgit de l’histoire, le texte est fort et fait entendre l’infinie complexité des rapports humains quand il s’agit de juger, de décider et d’apprécier si l’on peut faire confiance ou si l’on doit se méfier.
Quant au jeu d’Axelle Maricq et d’Emmanuel Salinger, il fonctionne déjà bien, mais pourrait encore être un peu plus rodé pour gommer les quelques exagérations dont le spectacle peut tout à fait se passer.
Notre avis ?
C’est une enquête haletante à laquelle Les Passagers nous convie avec une écriture qui reprend les codes les plus sûrs de la fiction : tension et suspens, renversements successifs, révélations surprenantes et bien évidemment, un beau twist final que nous ne révélerons pas ici.
Si l’on aime les petites histoires, qui se mêlent à la grande Histoire et à l’actualité, on n’est vraiment pas déçu-e par ces Passagers !
Voir cette publication sur Instagram
En savoir plus :
- Les Passagers au Festival Off Avignon 2022 au Théâtre du Chêne Noir, du 7 au 30 juillet à 19h30. Relâches les 11, 18, 25 juillet
- Durée du spectacle : 1h30
- Spectacle à partir de 15 ans