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Les Eblouis affiche film 2019

Critique / “Les Éblouis” (2019) de Sarah Suco

Dernière mise à jour : septembre 23rd, 2021 at 03:59 pm

Les Eblouis, premier film de Sarah Suco avec Camille Cottin et Jean-Pierre Darroussin, sort dans les salles de cinéma le 20 novembre 2019. Cette oeuvre dramatique raconte l’histoire vraie de la réalisatrice, qui y revient sur l’embrigadement de sa famille dans une secte. L’avis et la critique film de Bulles de Culture. 

Synopsis :

Camille (Céleste Brunnquell), 12 ans, passionnée de cirque, est l’aînée d’une famille nombreuse. Un jour, ses parents intègrent une communauté religieuse basée sur le partage et la solidarité dans laquelle ils s’investissent pleinement. La jeune fille doit accepter un mode de vie qui remet en question ses envies et ses propres tourments. Peu à peu, l’embrigadement devient sectaire. Camille va devoir se battre pour affirmer sa liberté et sauver ses frères et sœurs.

Les Eblouis, l’histoire vraie de la réalisatrice

Actrice fétiche de Louis-Julien Petit (Les Invisibles, Discount), Sarah Suco, actrice dynamique et enjouée, cache en réalité une énorme fêlure. A travers son premier long métrage en tant que réalisatrice, celle-ci a choisi de confier au spectateur la douleur de son histoire vraie. La jeune cinéaste a en effet vécu aux côtés de ses parents dans une communauté charismatique religieuse jusqu’à ses 18 ans.

A force de courage, elle a réussi à se sortir de ce calvaire, laissant ses proches derrière elle en prise à cette secte. Aujourd’hui, Sarah Suco n’a plus aucun contact avec eux, même si elle confie que sa mère et son père ont vu le film.

Alors que les médias évoquent en grande pompe les problématiques du terrorisme ou des Gilets jaunes, Les Eblouis vient mettre en lumière un thème de société passé dans l’ombre. Le phénomène des sectes a eu son instant de médiatisation en 1984 lors du massacre de l’Ordre du temple solaire.

Près de 30 ans plus tard, et en l’absence de faits divers marquants, la lutte contre ces mouvements n’est plus une priorité pour le gouvernement. Les Eblouis est notamment là pour rafraîchir la mémoire collective, politique comprise, sur ce fléau qui emporte bien plus de jeunes que Daesh.

Magnifique confession d’une réalisatrice en hommage à ses proches victimes d’une secte

Sarah Suco réussit ici un film marquant, nourri par son vécu. Sa réalisation porte évidemment les stigmates d’un premier film, notamment quant à son rythme.

Sur des bases solides, l’histoire de cette jeune Camille est très bien introduite. Le personnage est passionnée de cirque, activité qui l’ouvre sur le monde. Puis, la radicalisation de sa mère va marquer peu à peu l’enfermement de la protagoniste vers un monde plus sombre. Elle est alors obligée de sacrifier ses envies pour suivre ses parents dans cette communauté aux règles infâmes.

Privation de liberté, exorcisme, la jeune rebelle va subir le martyre face à un gourou incarné par un Jean-Pierre Darroussin métamorphosé. Heureusement, sa communication avec le monde extérieure, à travers notamment sa scolarisation, va lui offrir un regard critique sur ce qui est en train d’arriver à ses parents.

Le cinéma français tient une nouvelle révélation féminine en la personne de Céleste Brunnquell, dont le talent a été repéré grâce à l’excellent travail de Elsa Pharaon au casting. Pour son premier rôle, la petite blonde est d’ailleurs dans la short-list des révélation des César 2020.

Du côté des acteurs confirmés, Camille Cottin, dans son premier rôle dramatique, est très convaincante, jouant avec nuance un basculement vers la folie. Au départ, son personnage est une comptable fragile bien insérée dans la société. Puis, sous l’impulsion d’un illuminé, elle va pousser sa famille vers l’isolement, devant les yeux de son mari (Eric Caravaca), complètement atone.

Si la première partie du film, la phase d’embrigadement, est intense, Les Eblouis souffre cependant de moments de faiblesse une fois la narration installée lorsque Sarah Suco s’attache à décrire le quotidien de cette communauté. Mais certaines scènes chocs viendront réveiller les consciences comme celles tournant autour des instants de prières expiatoires où Camille doit se libérer de l’esprit malin qui siège en elle.

La chute finale, à la fois forte et abominable, viendra redonner une énergie à ce film, magnifique confession d’une réalisatrice en hommage à ses proches victimes d’une secte.

En savoir plus :

Antoine Corte

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