Entre la vie et la mort a ouvert le Festival du Film Policier de Reims en avril dernier. Le film avec Antonio de la Torre, Marine Vacth et Olivier Gourmet sort sur les écrans le 29 juin. A cette occasion, Bulles de Culture a rencontré son réalisateur, Giorgano Gederlini, qui après avoir collaboré avec Ladj Ly à l’écriture du long métrage Les Misérables, revient à la mise en scène avec un polar haletant.
Synopsis
Leo Castaneda (Antonio de la Torre) est espagnol, il vit à Bruxelles, où il conduit les métros de la ligne 6. Un soir, il croise le regard d’un jeune homme au bord du quai. Des yeux fiévreux de détresse, un visage familier… Leo reconnait son fils Hugo, lorsque celui-ci disparait tragiquement sur les rails ! Leo qui ne l’avait pas revu depuis plus de deux ans, va découvrir qu’Hugo était impliqué dans un braquage sanglant. Il va devoir affronter de violents criminels pour tenter de comprendre les raisons de la mort de son fils.
Giordano Gederlini : “L’image est un élément narratif”
Bulles de Culture : Entre la vie et la mort, c’est un polar singulier qui laisse de la place à une mise en scène travaillée et très artistique…
Giordano Gederlini : Je pense que vous parlez surtout de la musique de Laurent Garnier. La bande originale est très atmosphérique. Quand on en parlait tous les deux, on était d’accord sur le fait qu’il y avait deux temps à adopter pour le film : d’une part des moments d’action à faire ressortir avec une accélération, d’autre part il y avait de la place à la contemplation où on devait s’attacher à la complexité des personnages.
Bulles de Culture : Si la musique a une place dans le film, c’est que vous avez laissé le champ musical pénétré dans votre univers, qui est constitué d’une lumière particulière, d’une ambiance singulière…
Giordano Gederlini : Tout à fait ! L’image est un élément narratif. C’est une image assez sophistiquée. On a été chercher des focales vintages, utilisés notamment pour Apocalyspe Now. Les caméras d’aujourd’hui tentent d’effacer ces espèces de brillances, de rayons de lumière qui se diffusent. On a une image qui est loin du cinéma social parce que l’image est tout le temps en train de montrer qu’on est dans un polar. Il y a des imperfections techniques qu’il faut accepter car on est dans un univers de thriller. Je voulais que l’image rappelle qu’on n’est pas dans un film naturaliste mais dans une œuvre de cinéma.
“On retrouve donc mon identité, mes angoisses dans ce film“
Bulles de Culture : Vous avez écrit beaucoup de films sociaux. Vous avez notamment collaboré avec Ladj Ly sur son film Les Misérables. Entre la vie et la mort s’écarte-t-il totalement du film social ?
Giordano Gederlini : Je sors d’un travail avec Ladj Ly. Pas plus tard qu’hier, je travaillais avec lui sur son prochain film. Je suis très imprégné de cet univers social en tant que fils d’étranger vivant en France. Dans ce film, il y a beaucoup de personnages qui viennent d’autres minorités. C’est ma façon de ne pas adopter totalement un discours social dans ce thriller mais d’y laisser quand même ma patte. Par exemple, lorsque le personnage principal rentre dans une pharmacie en pleine nuit, il est accueilli par une pharmacienne noire.
Il n’y a pas cependant dans Entre la vie et la mort ce thème social aussi marquant que dans le projet de Ladj Ly qui est pour le coup très politique. J’avais peut-être envie personnellement d’aller sur un terrain plus fictionnel dans lequel je m’amuse un peu plus avec un scénario en puzzle. Quand je vois le film, je me reconnais beaucoup. J’ai choisi de raconter l’histoire d’un espagnol qui vit en Belgique. Il est exilé. On retrouve donc mon identité, mes angoisses dans ce film, même si c’est un thriller.
“je pense à Davis Goodis, grand écrivain de romans noirs“
Bulles de Culture : Quelles inspirations avez-vous eu pour Entre la vie et la mort ?
Giordano Gederlini : Des films américains avec comme thème principal la rédemption ! On essaye de construire le présent alors que le passé est encore cassé. C’est typique des polars des années 50/60. Je pense à David Goodis, grand écrivain de romans noirs de ces années là qui a adapté nombreux de ses écrits à l’écran en signant un deal avec la Warner. Dans cette même veine, j’avais d’ailleurs envie d’un titre brutal pour mon film. Entre la vie et la mort, comme s’il n’y avait pas vraiment de choix entre les deux. C’est cette tension que je trouve fascinante.
Bulles de Culture : Pourquoi avoir choisi Antonio de la Torre et Marine Vacth pour interpréter les têtes d’affiche ?
Giordano Gederlini : Avant de vivre en Belgique, j’ai vécu 5 ans en Espagne. Je suis un inconditionnel du réalisateur Rodrigo Sorogoyen (Madre, El Reino). C’est d’ailleurs lui qui m’a donné envie à nouveau de mettre en scène. Son acteur fétiche est Antonio de la Torre. Je l’ai rencontré assez tôt dans le processus d’écriture du scénario. Il a souri en lisant mes premières ébauches : “je sais pourquoi tu viens me voir” m’a t’il dit. Il a joué des personnages torturés, qui s’expriment avec peu de mots mais avec une densité folle dans le regard.
J’ai su que Marine Vacth avait envie d’explorer d’autres types de personnages dans sa filmographie. Elle a accepté tout de suite. J’étais un peu étonné au début parce que je sais que c’est une actrice exigeante. Dès que je l’ai vue, je savais que le duo avec Antonio de la Torre allait être formidable. Ce sont deux piles électriques qui n’ont rien en commun.
Entretien réalisé le 16 juin 2022 à Paris
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Date de sortie France : 29/06/2022 - Distribution France : Le Pacte