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Du miel sous les galettes

Critique / “Du miel sous les galettes” (2020) de Roukiata Ouedraogo

Dernière mise à jour : mars 8th, 2021 at 12:32 am

Avec Du miel sous les galettes, l’auteure Roukiata Ouedraogo emmène le lecteur au Burkina Faso entre Fada N’Gourma et Ouagadougou. Les éditions Slatkine et Cie offrent un très beau livre d’une auteure inconnue, mais célèbre pour ses spectacles sur scènes, au cinéma et comme chroniqueuse à France Inter. Une véritable trouvaille où alternent le présent et le passé de Yasmina. Devenue marraine de la Journée internationale de la Francophonie, des souvenirs l’affleurent, de sa plus jeune enfance, dès ses neuf mois dans son pagne sur le dos de sa mère, Djelila, à ses spectacles sur scène. La critique et l’avis sur ce livre. 

Cet article vous est proposé par le chroniqueur Chris L..

Synopsis :

Roukiata est née au Burkina-Faso. De sa plume, légère et nostalgique, elle raconte avec tendresse et humour ses années d’enfance, son pays, ses écrasantes sécheresses et ses pluies diluviennes, la chaleur de ses habitants, la corruption et la misère. Elle raconte sa famille, sa fratrie, ses parents, l’injustice qui les frappe avec l’arrestation de son père. Mais, surtout, elle raconte sa mère. Cette femme, grande et belle, un « roc » restée seule pour élever ses sept enfants, bataillant pour joindre les deux bouts, en vendant sur le pas de sa porte ses délicieuses galettes.

Du miel sous les galettes : la pugnacité d’une femme

La vie de la famille Sankaké est durablement frappée par des évènements qui bouleversent leur existence. Victime d’une injustice, accusé à tort, le père se retrouve en prison laissant dans le besoin sa femme et ses sept enfants. Finis les voyages de Djelila en Côte d’Ivoire pour acheter des produits qu’elle revendait à Fada N’Gourma. Heureusement, elle a conservé certains produits de qualité qui lui permettent d’améliorer le quotidien des siens et d’éviter la misère totale.

Elle se bat pour élever, avec rigueur et attention, ses sept enfants, ses sept piliers comme elle aime les nommer. Elle sacrifie tout pour leur éducation. Volontaire et déterminée, elle commence à fabriquer et vendre des galettes sous lesquelles se cache le miel, sur son pas de porte. Et très rapidement le succès est au rendez vous. Une voisine envieuse aimerait connaître son secret pour la concurrencer.

D’autres connaissances se détournent désormais de cette famille tombée dans l’opprobre. Pour certaines autres personnes elle est, un modèle, un exemple, une résistante, ce qui rend ces femmes fières. Surnommée la Baronne ou la Dame de fer, Djelila, grande et belle femme de trente cinq ans, se bat pour sauver son mari, Hamado. Ses démarches locales ou à Ouaga, toujours accompagnée de Yasmina, sont épuisantes et coûteuses, mais indispensables. Rarement elle perd pied, et elle demeure toujours digne dans l’adversité. Elle en impose par son courage, sa pugnacité, à se battre contre les petits potentats qui règnent dans l’administration.

Un voyage dépaysant guidée par une plume légère

Le Burkina Faso, sous le soleil et la chaleur écrasante, dans la sécheresse, sous des pluies torrentielles, est décrit dans ses modes de vie, sa corruption, ses dérives bureaucratiques et politiques. Des bus surchargés, souvent en panne, rallient avec difficultés la capitale sur des routes défoncées. Le destin du fils Sankaké, Bouba, se joue sur ces chemins sinueux. Par hasard il devient instituteur, pour  ne pas avoir pu être à l’heure pour l’examen du ministère de l’agriculture à cause d’un retard de son bus. Les enfants qui vont à l’école n’ont pas une franche passion pour les cours, alors que Yasmina, à peine cinq ans, espionne depuis l’extérieur les cours. Officiellement elle n’est pas en âge d’être scolarisée, mais face aux capacités précoces de l’enfant, l’institutrice la prend en charge.    

Il y a tant à découvrir, qu’il n’est pas envisageable, ni souhaitable de tout dévoiler. Il faut tout simplement lire Du miel sous les galettes. Les réflexions de Yasmina sur son métier, la France et certaines de ses pratiques, sa nouvelle langue maîtrisée alors que sa langue natale est le moré, sont du plus grand intérêt. Son amour pour sa mère est débordant. C’est une véritable guide qu’elle souhaite avoir à ses côtés lors de son accouchement. L’épilogue est très émouvant, notamment quand elle aborde le sujet de l’excision.

Roukiata Ouedraogo a entrainé ses lecteurs dans un voyage dépaysant, en dévoilant beaucoup sur sa famille avec pudeur. Guidé par une plume pleine de légèreté, d’humour, de tendresse, le texte est fluide, critique, sans rancœur, plein de sincérité. Un livre où l’espérance règne malgré l’âpreté de la vie quotidienne des Burkinabè. Une superbe découverte à absolument faire partager.   

En savoir plus :

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