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Matt Ross
© Emiien Moreau

♥ Interview / Matt Ross, réalisateur de “Captain Fantastic” : “Faire un portrait humaniste, nuancé et intelligent des Amériques au sein des États-Unis”

Dernière mise à jour : juin 19th, 2021 at 10:09 pm

“La création de notre pays était fondée sur des gens fuyant les persécutions pour un monde nouveau”

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© Mars Films

Bulles de Culture : Vous parlez de religion dans Captain Fantastic, vous semblez notamment critiquer le christianisme. Avez-vous été éduqué dans cette religion ?

Matt Ross : Ma mère était bouddhiste mais j’ai était élevé d’une manière non traditionnelle. J’allais à l’église mais aussi à tout plein d’autres cérémonies religieuses de différents continents…

Mais non, pour moi, le film n’est pas “anti-chrétien”. Ça parle plus de l’absence de séparation entre l’Eglise et l’Etat aux Etats-Unis. Je ne vois jamais de politiciens français parler de leur amour profond pour Jésus Christ, même s’ils sont catholiques et qu’ils vont a l’église, ils n’en parlent pas. Ça ne fait pas parti de leurs rôles de politiciens. Alors qu’aux Etats-Unis, on ne peut pas devenir président sans parler de son profond et irréductible amour envers Jésus Christ.

Ce que je trouve affligeant et triste car la création de notre pays, son mythe était fondée sur des gens fuyant les persécutions pour un monde nouveau où tout le monde pouvait être ce qu’il voulait être. C’était un charmant conte de fée, mais la réalité est que pour être un puissant politicien, il faut parler de Jésus tout le temps.

Et je trouve cela tragique car tout le monde n’est pas chrétien. Et pourtant nous sommes véritablement un pays chrétien d’une certaine façon. Et  ce n’était ni l’espoir ni la promesse de notre démocratie si particulière.

Donc pour moi, ça parle plus des enfants qui comprennent tout cela et qui s’y opposent en disant que c’est ridicule. Ils sont assez intelligent pour analyser ce qui se passe culturellement et pour le commenter. Ça n’a rien à voir avec une attaque contre le christianisme, qui est selon moi une très belle religion.

Bulles de Culture : Mais avez-vous eu aux États-Unis des réactions négatives pour Captain Fantastic à cause de cela ?

Matt Ross : Non parce que je pense que les gens qui seraient le plus gênés par ça ne vont probablement pas trop au cinéma. Mais je suis quand même au courant de certaines réactions.

D’abord, lors des questions/réponses avec le public, même si ceux qui viennent poser des questions ont généralement apprécié le film. Ensuite, il y a les critiques, mais après Sundance, j’ai arrêté de les lire car ce n’est pas sain pour moi.

Si vous avez aimé, je suis juste satisfait, mais si vous n’avez pas aimé, je pense que vous avez raison. Ça me dévaste, et ce n’est pas bon pour moi. C’est comme un ascenseur émotionnel alors j’ai juste arrêté.

Je suis quand même au courant de ce que disent les critiques qui ont aimé le film, ceux qui sont partagés et ceux qui n’ont pas aimé. Je sais sur quoi on me complimente et sur quoi on me critique, alors maintenant j’arrête.

Cependant on vit dans un monde de réseaux sociaux. Avec Twitter, si tu vas voir un film dans un festival, à peine le film terminé, il y 5000 tweets, instantanément. Du coup je ne lis plus ça non plus…

Mais pour en revenir à la question, très peu de gens ont eu une réaction négative à ce sujet. Peut-être une personne ou deux, mais je pense qu’ils ont juste mal compris l’intention.

Ce n’est pas du tout contre le christianisme en soi. Ben Cash est le genre de personnage qui donnerait à ses enfants la Bible, le Coran, le Vieux Testament… Il les aurait introduit au sophisme, au bouddhisme, en leur disant : “Vous pouvez choisir ce que voulez, une, toutes ou aucune. Pensez par vous-même ! Et si vous êtes attiré par une de ces religions, ok, je ne m’y oppose pas, c’est votre choix”. Il ne dicte pas ce qui est juste ou faux, c’est l’opposé.

Donc ça n’a pas tant à voir avec une religion en particulier mais plutôt la place qu’elle occupe aujourd’hui au sein des États-Unis.

Emilio M.

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