Sur Bulles de Culture, art, cinéma, littérature, musique, spectacles, télévision... chaque jour, la culture sort de sa bulle.
Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones de Jan Martens photo danse
© Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon

Critique Avignon 2021 / “Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones” de Jan Martens

La compagnie GRIP & Dance On Ensemble, sous la direction de Jans Martens, recrée une microsociété au Festival d’Avignon 2021 : tous les âges et toutes les couleurs de peau sont représentés. Dans Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones, pièce politique, le chorégraphe belge interroge la rébellion. Qu’est-ce que la résistance ? Les 17 danseurs explorent le moment où quelqu’un décide d’aller à contre-courant. L’avis et la critique de Bulles de Culture.

Synopsis :

Révoltes, mouvements sociaux, quel langage le corps peut-il adopter ? Faut-il opter pour le repli face à la tourmente ? L’immobilisation peut-elle être considérée comme un acte de rébellion ?

Jans Martens interroge le progrès face au passé, le gris face au rouge, la réflexion face au mouvement. La compagnie GRIP & Dance On Ensemble nous donne à voir le corps dans toutes ses secousses.

Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones : une citation du président chinois

Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones de Jan Martens photo danse
Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

Le titre de ce spectacle peut surprendre par sa longueur et sa complexité. Jan Martens a repris une réplique du président chinois XI Jinping lors des manifestations à Hong Kong en octobre 2019.

« Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones » signifie « Toute tentative se terminera par des corps écrasés et des os brisés ». En résumé, tout un programme démocratique… ! À cette violence verbale, Martens propose une réponse.

Partant de la révolution des parapluies à Hong Kong, le chorégraphe a travaillé sur la révolte du corps avec ses danseurs. Il nous propose une expérimentation idéologique.

Dans notre époque où les mouvements sociaux deviennent légions en Catalogne, au Liban, en passant par l’Algérie ou l’Irak… partout dans le monde, d’immenses vagues de citoyens ont investi les rues. Quel miroir le chorégraphe peut-il tendre à ces soulèvements ? Faut-il opter pour le calme ou la violence ?

Métaphores de la protestation

Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones de Jan Martens photo danse
Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

Jan Martens s’inspire tout au long du spectacle Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones des positions corporelles adoptées par les manifestants. Les baskets couinent sur le parquet. Les pas réguliers sont à l’unisson. Les danseurs nous proposent un travail postmoderne et obsessionnel sur le geste : solos, pas de deux, scènes de groupes ou solos collectifs.

Les lignes de tension qui agitent notre temps se retrouvent tracées au sol. Les 17 danseurs parcourent ces lignes géométriques blanches et concentriques, comme un chemin à suivre. Les déphasages alternent avec de superbes jetés.

La performance est obsédante. Elle est rythmée par des chansons de protestation. De Górecki, claveciniste polonais sous le joug de l’URSS, à Max Roach, batteur lié au mouvement des droits civiques des noirs américains, le choix musical illustre la révolte.

Des slogans de manifestation ponctuent de façon récurrente les mouvements des danseurs. Une chorégraphie exténuante mais touchante, un hommage à la désobéissance.

Certes, la création de Martens se veut critique mais elle est pleine d’espoir. La conclusion est simple : le fait d’être ensemble n’empêche pas la singularité. Car à l’image de la variété de sa troupe atypique, le but ultime du chorégraphe flamand est d’embrasser la diversité du monde.

Notre avis ?

Un public partagé, une vingtaine de spectateurs quittent le théâtre au bout de 30 minutes, mais la majorité applaudit debout à la fin. Signe que le travail de Jan Martens est exigeant, peut-être un peu hermétique si l’on ne lit pas la note d’intention.

Mais l’investissement physique des danseurs est indéniable dans Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones. Postures nerveuses, tics du corps toujours en boucle. Tout n’est que rigueur et rage. Ils suent, les corps brillent sous la lumière graphique de Fedinger et Walter.

Oui, la répétition en boucle d’un même geste sur un même thème musical peut fatiguer, déstabiliser, perturber voire angoisser.

Oui, la projection en fond de scène de SMS d’insultes peut choquer.

Mais le but ultime n’est pas de séduire mais de faire réagir, et c’est gagné.

Ce spectacle ne peut pas laisser indifférent. Tout comme les costumes passent du gris terne au rouge , la capacité de résistance du public peut alors prendre des couleurs vives.

En savoir plus :

  • Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones à la Cour du Lycée Saint Joseph les 18, 19, 20, 22, 23, 24 et 25 juillet à 22h dans le cadre du Festival d’Avignon 2021.
  • Distribution : Pierre Bastin, Georgia Boddez, Ty Boomershine, Truus Bronkhorst, Jim Buskens, Baptiste Cazaux, Zoë Chungong, Piet Defrancq, Naomi Gibson, Wannes Labath, Kimmy Ligtvoet, Cherish Menzo, Steven Michel, Gesine Moog, Dan Mussett, Wolf Overmeire, Tim Persent, Courtney May Robertson, Laura Vanborm, Zora Westbroek, Loeka Willems
  • Durée : 1h30
Frédérique C.

Un commentaire

  1. Jean-Christophe Gauthier

    Non, non et non ! Je ne suis pas d’accord. Je proteste. Je manifeste ma réprobation. Il n’est pas humain, pas courtois, pas décent de nous infliger un tel spectacle! Affligeant ! Ok, nous brosser en quelques tableaux la mécanique humaine bafouée. Ok nous évoquer une musique grinçante du désarroi, des foules qui marchent en allure militaire automatisée. Mais par respect du public et de nos sensibilités artistiques ne pas nous l’imposer durant quatre-vingts longues minutes. Soit, le final est jovial, coloré et rattrape le tout. Mais trop tard! Mon esprit chagrin est pris en otage et ne parvient plus à basculer du bon côté. Le mauvais goût des musiques, des postures, des injures m’a conduit à l’indigestion. Stop.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.