La vie de ma mère, premier film du réalisateur Julien Carpentier, est dans les salles depuis le 6 mars dernier. Le long métrage avec Agnès Jaoui et William Lebghil évoque l’histoire personnelle du cinéaste dont la mère souffre de bipolarité. Rencontre avec Julien Carpentier et William Lebghil.
Julien Carpentier : “La seule chose qui me raccrochait au cinéma était le nom de jeune fille de ma mère, qui est Jaoui”
Bulles de Culture : Est-il vrai que “La vie de ma mère” était à la base un court-métrage ?
Julien Carpentier : Oui, tout à fait. C’est quand j’ai proposé le projet à Agnès Jaoui qu’elle m’a répondu ne jamais travailler sur des courts métrages, faute de temps. Elle était néanmoins emballée par le sujet et le script. C’est parce qu’elle était intéressée que j’ai décidé de faire de cette histoire directement un long métrage. Je ne regrette absolument pas d’avoir franchi directement le pas sous l’impulsion d’Agnès.
Bulles de Culture : Pourquoi Agnès Jaoui était immanquablement votre actrice souhaitée ?
Julien Carpentier : Il y a plein de raisons, dont certaines très intimes. Je veux faire du cinéma depuis très jeune. J’évolue dans un milieu qui n’est pas du tout lié au cinéma. La seule chose qui me raccrochait au cinéma était le nom de jeune fille de ma mère, qui est Jaoui. De cet homonyme, je suis hyper sensible au cinéma de Jaoui et Bacri. Agnès Jaoui est une actrice complète pour moi : elle chante, danse, interprète des grands rôles. Il y avait quelque chose d’évident de me diriger vers elle pour mon début au cinéma.
Julien Carpentier : “j’aime passionnément William Lebghil à travers tout ce que j’avais vu de lui“
Bulles de Culture : Avez-vous longtemps cherché l’acteur qui allait jouer votre propre rôle devant la caméra ?
Julien Carpentier : J’avais d’abord envie d’aimer la personne qui allait camper mon rôle et j’aime passionnément William Lebghil à travers tout ce que j’avais vu de lui. Je le trouve tellement touchant, tellement bouleversant. Je ressentais tellement de sensibilité chez lui. J’avais aussi la certitude qu’il avait la capacité de pouvoir répondre à Agnès Jaoui.
Bulles de Culture : Justement, William, jugez-vous que “La vie de ma mère” est le scénario le plus sensible que vous avez interprété ?
William Lebghil : Oui. Il sort complètement de ma “ligne éditoriale”, si je puis dire. “Première année” de Thomas Lilti est peut-être le film qui se rapproche le plus de “La vie de ma mère“. Les deux projets alternent merveilleusement bien humour et émotion. C’est rare une telle qualité. Donc, je suis toujours enthousiaste à accepter ce genre de proposition.
Bulles de Culture : Entre Thomas Lilti et Julien Carpentier, vos rôles se centrent dans les deux cas dans l’univers de ces réalisateurs. Est-ce qu’il y a une pression à incarner à l’écran les propres histoires de metteurs en scène ?
William Lebghil : Non, c’est plutôt vraiment génial. J’ai déjà eu l’occasion de faire cela au théâtre. Quand c’est dans l’intime, ça pousse à la conversation, à se rencontrer. Je ne vais pas dire que c’est une responsabilité, ça me semblerait trop fort. Mais c’est touchant !
Julien Carpentier : “Un jour, je rencontre un auteur qui me dit : “Écris sur ce que tu connais !””
Bulles de Culture : Julien, qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce film ?
Julien Carpentier : Quand je commence à écrire, je suis extrêmement productif, mais je n’étais pas satisfait des résultats. Un jour, je rencontre un auteur qui me dit : “Écris sur ce que tu connais !”. Je trouvais cela un peu simpliste. Je me suis rendu compte a posteriori que c’était le meilleur conseil que je pouvais recevoir. Quand on regarde par exemple “Ad Astra” de James Gray, on se rend compte que même si l’univers se passe dans l’espace, le réalisateur parle avant tout de sa relation avec son père.
Bulles de Culture : William, comment avez-vous abordé la question de la bipolarité en préparant le film ?
William Lebghil : Le scénario en parle très bien. On a eu beaucoup de conversations avec Julien qui m’a éclairé sur lui, sur ce qu’il a vécu. Ça m’a beaucoup touché d’autant que ma copine a fait un documentaire sur un jeune homme de douze ans, qui avait une mère bipolaire et qui devait s’occuper d’elle. Il est sorti très vite de l’innocence et de l’enfance. Aujourd’hui, il a seize ans et ne veut plus du tout voir sa mère. Il y a un trop-plein de lui demander de grandir trop vite.
Bulles de Culture : Comment avez-vous noué cette relation filiale avec Agnès Jaoui ?
William Lebghil : Agnès m’avait fait passer des essais pour son film “Place publique” que je n’avais pas pu faire. J’étais donc très heureux de la retrouver sur “La vie de ma mère”. C’est quelqu’un que j’admire beaucoup. Au départ, j’étais hyper impressionné, tout comme Julien d’ailleurs. On n’était pas très à l’aise au début. Mais Agnès a su nous mettre à l’aise avec son côté maternel.
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- Date de sortie France : 06/03/2024
- Distribution France : KMBO