Dans le cadre du Festival du Film Francophone 2024 qui se déroule du 27 août au 1re septembre dans la ville d’Angoulême, “Au Revoir“, réalisé par Ronni Castillo, a été sélectionné dans la catégorie Coup de cœur par Marie-France Brière, déléguée générale du festival. A cette occasion, Nous avons rencontré le réalisateur dominicain.
“Au Revoir” : un film qui explore les frontières de l’identité et de la distance
Bulles de Culture : Ronni, pouvez-vous nous parler de votre parcours de cinéaste en République dominicaine et de ce qui vous a amené en France ?
Ronni Castillo : Bien sûr. J’ai débuté ma carrière de réalisateur en République dominicaine à l’âge de 25 ans, avec mon premier long métrage. En 2017, j’ai entamé une relation à distance avec une Française, et après la pandémie de Covid, nous avons décidé de vivre ensemble. En tant que réalisateur, j’ai la chance de pouvoir travailler depuis n’importe où, alors je me suis installé en France début 2021. C’est là que j’ai commencé à développer sérieusement une idée que j’avais depuis 2018, lors de ma première visite à Vannes en Bretagne (Morbihan). J’étais tombé amoureux de cette ville dès le premier regard et je savais que je devais y tourner un film un jour.
J’avais en main un scénario écrit par une amie, Maria Laura Gargarela, initialement centré sur un Argentin qui s’installait en Italie. J’ai commencé à adapter cette histoire pour en faire celle d’un personnage dominicain, car pour moi, en tant que réalisateur, il est essentiel d’apporter quelque chose de personnel à mes projets.
“Le film explore les défis de l’intégration et la découverte de l’autre
Bulles de Culture : Votre film traite de thèmes universels comme l’identité et les rencontres entre cultures. Pouvez-vous nous parler de l’inspiration derrière ce choix ?
Ronni Castillo : En République dominicaine, il y a une grande communauté française, notamment à Las Terrenas. Il n’est donc pas rare de voir des couples franco-dominicains. J’ai voulu intégrer cet aspect dans le film en faisant de Marco, le personnage principal, un dominicain marié à une française. Le film explore les défis de l’intégration et la découverte de l’autre, surtout lorsque la barrière de la langue et de la culture est présente. Pour enrichir cette dynamique, nous avons introduit un personnage haïtien adopté par une famille française dans les années 80, soulignant ainsi les différences et similitudes entre Dominicains et Haïtiens, deux peuples partageant la même île mais ayant des vécus si distincts.
“La Bretagne m’a beaucoup inspiré, surtout en tant que Caribéen. C’est le même Atlantique que nous connaissons, mais vu sous un autre jour.”
Bulles de Culture : Vous avez tourné en Bretagne, une région souvent marquée par une atmosphère unique. Comment cette région a-t-elle influencé le film ?
Ronni Castillo : La Bretagne m’a beaucoup inspiré, surtout en tant que Caribéen. C’est le même Atlantique que nous connaissons, mais vu sous un autre jour. Les Bretons ont une relation très intime avec la mer, bien différente de celle que nous avons en République dominicaine, où la mer est davantage perçue comme un passage ou un décor. En Bretagne, il y a cette brume, ce froid, qui offrent un contraste saisissant avec ce que je connais. Une des scènes du film, tournée à l’aube dans le golfe du Morbihan, capture parfaitement ce sentiment de solitude et d’étrangeté que j’ai ressenti.
Bulles de Culture : On sent dans “Au Revoir” une exploration de la découverte de l’autre et de soi-même. Comment ces thèmes sont-ils nés dans votre travail ?
Ronni Castillo : Ces thèmes sont très personnels pour moi. Lorsque j’ai déménagé en France pour vivre avec ma femme, nous n’avions jamais passé plus de quelques semaines ensemble auparavant. Cette nouvelle réalité m’a poussé à explorer l’idée que l’on ne finit jamais vraiment de connaître l’autre, même lorsqu’on vit ensemble. C’est aussi ce que vivent les personnages de Marco et d’Alice dans le film : apprendre à se découvrir en même temps qu’ils soignent leurs blessures respectives.
Bulles de Culture : Comment avez-vous vécu le tournage en France en tant que réalisateur étranger ?
Ronni Castillo : C’était une expérience très enrichissante. Nous avons principalement tourné en campagne, et les habitants ont été incroyablement accueillants. En République dominicaine, il y a une relation très commerciale avec le cinéma, notamment en raison des nombreuses productions américaines qui s’y déroulent. En France, c’était différent. Les gens étaient généreux et ouverts, prêts à nous aider sans rien attendre en retour. Cela a beaucoup contribué à l’atmosphère du film.
Bulles de Culture : “Au Revoir” est sélectionné dans la catégorie Coup de cœur de Marie-France Brière au Festival du Film Francophone d’Angoulême 2024. Comment avez-vous réagi à cette annonce ?
Ronni Castillo : J’ai été très ému d’apprendre que notre film avait été sélectionné comme Coup de cœur. Marie-France Brière a été touchée par l’idée d’un film dominicain tourné en France, une première. Elle est passionnée par la francophonie et voulait mettre en avant des productions francophones issues de pays latino-américains, ce qui est encore assez rare. Bien que le film ne soit pas entièrement en français, cela n’a pas freiné son enthousiasme.
Bulles de Culture : C’est la première fois que vous présentez le film à un festival français. Quelle est votre attente par rapport à la réaction du public français ?
Ronni Castillo : Oui, c’est la première fois. Je sais que le public français est très cinéphile et possède une grande connaissance du cinéma, ce qui peut en faire un public exigeant. Mais j’aime cette idée, car c’est stimulant et cela nous pousse à évoluer. J’ai hâte de voir comment le public français réagira, surtout concernant la partie du film tournée en France, et j’espère qu’ils ressentiront l’authenticité que nous avons essayé de capturer.
En savoir plus :
- Pour en savoir plus sur “Au Revoir”, consultez la page dédiée du festival : Au Revoir – Festival du Film Francophone 2024.