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Sallinger Léa Sananes affiche

[CRITIQUE] “Sallinger” par Léa Sananes : Rendez-vous avec Koltès

Dernière mise à jour : avril 5th, 2019 at 01:05 am

Le Théâtre Les Déchargeurs accueille actuellement Sallinger de Bernard-Marie Koltès dans une mise en scène de Léa Sananes. Notre avis sur cette lecture du grand dramaturge français.

Synopsis :

New-York. Un suicide. Celui du “Rouquin” (Thom Lefevre). Al (Mark Alberts) et Ma (Claire Devere) pleurent leur enfant. La fiancée Carole (Marie Sanson) est inconsolable, malgré la présence de son amie June (Mégane Martinel). Le frère Henry (Baudouin Sama) trompe sa crise existentielle avec un ami d’occasion (Gabriel Tamalet). La sœur Anna (Juliette Raynal) sombre elle aussi. Pendant ce temps, les États-Unis rentrent à nouveau en guerre…

Sallinger : Une pièce de théâtre brûlante

Bernard-Marie Koltès fait partie de ces dramaturges français “à la mode”, suffisamment sulfureux pour exciter les passions et suffisamment brillant pour être digne d’une reconnaissance légitime. Bernard-Marie Koltès est de ceux “que l’on n’aime ou que l’on n’aime pas”. C’est en tout cas un théâtre explosif, souvent expérimental et qui a ainsi comme mérite, peut-être même le plus grand de tous, de ne pas laisser indifférent. C’est donc à cet auteur dramatique très célèbre que s’attaque Léa Sananes, dont la proposition de mise en scène de ce Sallinger est aussi fiévreuse que le texte.

Une mise à nu du vide de l’existence

Un intérêt tout d’abord : celui de découvrir (ou de redécouvrir, pour les amateurs) une pièce de théâtre de Bernard-Marie Koltès a priori moins connue que celles qui ont fait sa renommée. D’instinct, on pense plutôt à Combat de nègre et de chiens, à Dans la solitude des champs de coton ou encore, à Roberto Zucco. Mais la pièce Sallinger n’est pas en reste. Souvent présentée comme une adaptation très libre des thématiques de J.D. Salinger, l’auteur de L’Attrape-coeurs, cette pièce de théâtre à multiples lectures s’avère immensément riche et percutante. Et la mise en scène de Léa Sananes se veut rythmée et résolument moderne : musiques, utilisation de la vidéo, abolition de la frontière spectateurs/espace scénique.

Sallinger capture ainsi très rapidement toute l’attention du spectateur qui assiste impuissant à la descente aux enfers d’une famille, quasiment immuable, si bien que l’on se demande si le suicide du fils “génie”, “Le Rouquin”, en est finalement l’élément déclencheur ou le révélateur. Sur fond des ravages causés par les guerres américaines passées et à venir, Bernard-Marie Koltès dépeint un tableau où se retrouvent des couleurs sombres. Il met à nu le vide de l’existence, la mélancolie, la jalousie, l’hypocrisie.

Une mise en scène “trendy” mais avec du fond

Il faut aller voir cette mise en scène de la pièce de théâtre Sallinger par Léa Sananes en gardant pour soi un réflexe très classique qui est celui d’être désabusé devant une pièce d’un auteur “à la mode” dans une proposition scénique “à la mode”. En effet, il est indéniable que cette version de Sallinger appartient à un type de mise en scène au diapason de ce qui est donné à voir aujourd’hui. Et si cette simple évocation est crispante, alors cette mise en scène risque de décevoir. Ainsi, l’impression première peut donc être que dans la recherche de la subversion, il n’y a rien de subversif. Malgré le rock, l’atmosphère électrique, les choix de scénographie, tout cela reste assez convenu.

Pourtant, l’ensemble est loin de laisser insensible et une fois passée la crispation devant une proposition qui se souhaite branchée, on se laisse emporter par le jeu des acteurs qui, il faut absolument le dire, donnent littéralement de leur personne pour porter le texte de Bernard-Marie Koltès. Mention spéciale à Mark Alberts et Gabriel Tamalet, absolument stupéfiants.

Ce Sallinger est donc une pièce de théâtre à voir si l’on accepte que derrière le côté “trendy”, il y a aussi du fond.

En savoir plus :

  • Sallinger de Bernard-Marie Koltès, mis en scène par Léa Sananes, au Théâtre Les Déchargeurs (Paris, France) du 11 septembre au 18 décembre 2017, tous les lundi à 19h
Agathe M.

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