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L’été est propice à la lecture. Voici les meilleurs livres de poche 2023 pour votre été. Cinq idées de lecture d’ouvrages, au charme incontestable, parus durant le 1er semestre 2023, en format poche, qui combleront quelques heures en vacances, en voyages, durant les transports et en bien d’autres circonstances.
L’abolition des privilèges de Bertrand Guillot
Avec L’abolition des privilèges, entre Histoire, récit et roman, Bertrand Guillot entre dans les pas de personnes, pas les plus connues mais celles qui ont fait la Nuit du 4 août 1789, pas aussi célèbre que le 14 juillet de la même année et pourtant si importante. En spectateur privilégié, nous suivons les débats, souvent cacophoniques, les surenchères portées par l’euphorie, qui s’emparèrent de l’Hôtel des Menus Plaisirs à Versailles, pour aboutir à l’abolition des privilèges, une véritable montagne, qui dévoraient l’Ancien régime. Cet acte est resitué dans un cadre plus global avec le rappel de ce qui fut avant cette date puis de ce qu’il advint après. D’une plume légère, précise, impertinente par instants, L’abolition des privilèges, travail soigné, fouillé, solidement basé sur les archives, n’hésite pas à souligner que les privilèges disparus ont été remplacés par d’autres.
De notre monde emporté de Christian Astolfi
De notre monde emporté de Christian Astolfi retrace cinquante ans de l’Histoire de France à travers les heures de gloire des chantiers navals de la Seyne sur Mer et leur mort programmée, face à une mondialisation galopante. La fierté et la solidarité ouvrière régnait au sein des équipes, aussi bien au travail éreintant que lors de manifestations. Chacun se trouvait affublé d’ sobriquet affectueux ; Horloger, Cochise, Mangefer, Filoche, ou Narval pour le plus jeune, celui qui raconte et se souvient avec nostalgie et tendresse de ces années, entachées par des disparitions dues pour beaucoup à l’amiante. Des personnages attachants, une fresque sociale et historique très réussie qu’in convient de lire pour ne pas oublier comment un fleuron de l’industrie française a pu disparaître et comment elle a véhiculé insidieusement la mort. Une véritable découverte, portée par une écriture allègre.
Le livre des heures d’Anne Delaflotte Mehdevi
Avec Anne Delaflotte Mehdevi, c’est une plongée dans le XVe siècle qui est offerte avec Le livre des heures. Nous suivons Marguerite, de sa naissance en 1468, au milieu d’une famille d’enlumineurs établie sur le pont de Notre-Dame. Elle adore Jacquot, son jumeau, malade et qu’elle protège au maximum. Elle s’oppose au destin que lui réserve sa mère : le mariage à tout prix, sans rechigner. Avec pugnacité et ténacité, elle réalise son rêve, celui d’être enlumineuse. Pour cela elle a bénéficié de la bienveillance de son père, de son grand-père, et de son parrain, des hommes sympathiques pour l’époque. Le livre limpide, avec de courts chapitres, aérés, met en avant une jeune fille qui se veut libre y compris dans son amour pour un Maure, elle la chrétienne. C’est sobre, synthétique, avec une puissance incontestable.
Le dernier mouvement de Robert Seethaler
Le dernier mouvement de Robert Seethaler met en scène Gustav Mahler, grand chef d’orchestre à son époque mais surtout un immense compositeur, novateur. Sur le bateau qui le ramène en 1911, à cinquante ans, avec sa fille cadette et son épouse, des Etats-Unis vers l’Europe, Gustav Mahler sait qu’il s’agit de sa dernière traversée et que bientôt il ne sera plus. Comme à son habitude Robert Seethaler est tout en retenue, tout en concision. En à peine 144 pages, il restitue des scènes choisies de la vie du musicien donnant l’impression au lecteur de connaître cet homme qui navigue entre instants difficiles et instants de bonheur, au service exclusif de la musique. Un auteur toujours en nuances et en finesse, très minimaliste, qui poursuit une œuvre très personnelle, qui aime capter des instantanés d’une vie. Il n’y a rien à découvrir ne s’agissant pas d’une biographie. De la bonne littérature.
Les accords silencieux de Marie-Diane Meissirel
Marie-Diane Meissirel, pour son quatrième roman, Les accords silencieux, concocte une histoire qui parle de musique, d’un piano Steinway, de Rachmaninov et Horowitz, d’histoires d’amour, de la famille Schultz, d’un Adagio de Bach, mais pas seulement. En effet il est aussi question de la seconde guerre mondiale, de l’invasion de la Chine par le Japon, de la Révolution culturelle, des évènements de Tian’anmen, de la Russie, de la perte d’êtres chèrs. De 1937 à 2014, le terrain de jeu de l’auteure est tout simplement celui du Monde, dans lequel se meuvent les personnages et un piano sur lequel sont gravés deux papillons. Pour que tout se dénoue, il faut attendre les dernières pages et découvrir la lettre d’amour qui explique Les accords silencieux. Un moment plaisant de lecture grâce à une bonne intrigue portée par une écriture agréable à suivre.
Cinq auteurs, cinq univers, avec cependant un point commun, la présence plus ou moins affirmée de l’Histoire. Des auteurs qui méritent d’élargir leur lectorat.
En savoir plus :
- Bertrand Guillot, L’abolition des privilèges, Points, mars 2023, 264 pages, 8,30 euros, Les Avrils, janvier 2022, 256 pages, 20 euros
- Christian Astolfi, De notre monde emporté, Christian Astolfi, Pocket, mars 2023, 192 pages, 7,30 euros, Le bruit du monde, avril 2022, 192 pages, 19 euros
- Anne Delaflotte Mehdevi, Le livre des heures, Folio, mai 2023, 224 pages, 8,10 euros, Buchet-Chastel, janvier 2022, 224 pages, 17,50 euros
- Robert Seethaler, Le dernier mouvement, Folio, mai 2023, 144 pages, 7,50 euros
- Sabine Wespieser éditions, février 2022, 128 pages, 15 euros
- Marie-Diane Meissirel, Les accords silencieux, Pocket, juin 2023, 272 pages, 8,30 euros, Les escales, janvier 2022, 256 pages, 20 euros
