Critique / « L’Hermine » (2015) de Christian Vincent

Dernière mise à jour : novembre 15th, 2021 at 09:50

Horticulteur un peu barré dans Un début prometteur sous la direction de sa fille, Emma, il y a bientôt deux mois, Fabrice Luchini enfile cette fois un costume plus conventionnel mais reste un de ces personnages hors-du-commun qu’il affectionne dans L’Hermine de Christian Vincent. L’avis et la critique film de Bulles de Culture.

Synopsis :

Michel Racine (Fabrice Luchini) est un Président de cour d’assises redouté. Aussi dur avec lui qu’avec les autres, on l’appelle « le Président à deux chiffres ». Avec lui, on en prend toujours pour plus de dix ans. Tout bascule le jour où Michel Racine retrouve Ditte Lorensen-Coteret (Sidse Babett Knudsen). Elle fait partie du jury qui va devoir juger un homme accusé d’homicide. Six ans auparavant, Racine a aimé cette femme. Presque en secret. Peut-être la seule femme qu’il ait jamais aimé.

L’Hermine : les mystères de la cour d’assises

Le réalisateur Christian Vincent nous propose dans L’Hermine une immersion dans le monde des cours d’assises. Si l’expérience n’est pas inédite, à voir toutes les reportages plus glauques les uns que les autres que l’on peut voir à la télé, le réalisateur prend la peine de nous éclairer sur qui fait quoi.

Ainsi en sortant de la salle, on sait à peu près comment fonctionne une cour d’assises, et on peut éviter de se faire reprendre — Monsieur le Président, pas Monsieur le Juge ! — comme le fait Michel Racine plusieurs fois pendant le film.

Dans une cour d’assises, on est confronté à des situations dramatiques comme là, l’homicide d’un enfant perpétré par un de ses parents. Et privilège de la République et de la démocratie, ce sont des hommes qui, devoir de citoyen oblige, doivent se plier à l’exercice du jugement.

Ce sont donc des hommes et des femmes — dans ce cas,  une galerie de personnages plus ou moins intéressants —, rassemblés sous la forme d’un jury, qui vont juger d’autres hommes. Et c’est à un homme, en l’occurrence Michel Racine, qu’il revient de gérer ce jugement, de telle sorte qu’il soit le plus équitable possible. Ce dernier est conscient de ses responsabilités et ne les prend pas à la légère, s’immergeant totalement dans sa fonction, travaillant alors même qu’il est tremblant de fièvre.

Cela fait de lui un homme à part, mais un homme tout de même, qui finit par se faire rattraper par ses émotions.

Le poids de la fonction

Christian Vincent, en plus de nous plonger dans les coulisses de la justice, fait dans L’Hermine le portrait d’un homme de convictions et nous montre à quel point il peut être difficile, dans un monde où tout est porté en dérision, d’en être un.

Parce qu’il a décidé d’être cet homme là, Miche Racine provoque l’admiration chez certains, la crainte chez d’autres, sinon le malaise. Situation pas facile à gérer, il lui arrive même d’essayer de se justifier.

Il s’éloigne donc des autres jusqu’à ce qu’il retrouve cette chère Ditte qui avait déjà réussi une fois à percer la carapace dont il s’est enveloppé. Et là, on découvre quelqu’un de totalement différent. C’est désormais un homme tout chamboulé, qui met sa parfaite élocution au service de la séduction.

Et qui mieux que le comédien Fabrice Luchini pour tenir un tel rôle ?

Fabrice Luchini, le séducteur

Pourtant loin du caractère exalté qu’on lui connaît, Fabrice Luchini réussit néanmoins à distiller dans L’Hermine la passion de son personnage dans les quelques dialogues qu’il échange avec les autres, dans un jeu plus organique. Et lorsqu’il retrouve son verbe si particulier pour exprimer ses sentiments à la femme qu’il aime, on comprend que celle-ci soit séduite, allant au delà de son physique très éloigné du jeune premier.

En effet, quelle femme ne voudrait pas être à l’origine de ces mots qui sembleraient ridicules dans la bouche d’un autre et sonnent si juste dans la sienne ?

Il faut dire qu’en face se trouve une femme à la classe innée, une vraie beauté sans l’aide d’un bistouri. On comprend tout à fait que l’actrice danoise Sidse Babett Knudsen qui illumine littéralement la cour d’assises ait pu retourner le cerveau d’un homme pourtant blasé. Une actrice qu’on sera content de revoir dans l’Inferno de Ron Howard, prévu pour l’année prochaine auprès de — cocorico ! — notre gloire nationale, Omar Sy.

Notre avis ?

Avec L’Hermine, Christian Vincent nous raconte une histoire d’amour mais nous rappelle aussi au final la subjectivité de la justice rendue par les hommes.

On peut aussi mesurer l’importance du regard que les autres peuvent porter sur nous, que ce soit sur la coiffeuse qui se fait systématiquement recaler comme juré à cause de son air écervelé, sur l’accusé qui a l’air coupable pour les uns ou juste paumé pour les autres, ou encore su le Président de la cour d’assises à l’air misanthrope et qui pourtant va s’humaniser en présence de la femme qu’il aime.

Le réalisateur apporte donc de la chaleur dans un lieu à priori glacial, un endroit où l’avenir est souvent en suspens. Ce faisant, il nous offre un moment de cinéma intéressant, ne serait-ce que pour la performance de Fabrice Luchini, justement récompensé pour ce rôle à la Mostra de Venise.

En savoir plus :

• Date de sortie France : 18/11/2015
• Distribution France : Gaumont Distribution

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Fanny N.

Rédactrice / Editor chez Bulles de Culture

J'aime rire, j'aime pleurer, l'aime danser, j'aime chanter et tout ça, je le vis souvent au cinéma.

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