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Stéphane Brizé Festival CitéCiné 2024
Georges Biard

Interview / Stéphane Brizé pour “Hors saisons”

A l’occasion du Festival CitéCiné qui s’est déroulé à Carcassonne du 11 au 15 janvier dernier, nous avons rencontré le réalisateur Stéphane Brizé, président du jury fiction, qui présentait également son prochain film “Hors saisons”, en salle le 20 mars prochain. 

Mise à jour 22 mars 2024

Stéphane Brizé : “Je pense qu’un film politique est une œuvre qui observe le monde”

Bulles de Culture : Lorsqu’on vous a sollicité pour présider la 6e édition du Festival CitéCiné de Carcassonne, vous êtes-vous interrogé sur la définition d’un “film politique” ?

Stéphane Brizé : Non, car on m’a déjà posé cette question par rapport à mes films. Je pense qu’un film politique est une œuvre qui observe le monde, qui scrute les hommes et les femmes évoluant en son sein. Notre humanité confrontée au fonctionnement du monde constitue véritablement la définition intrinsèque de la politique : la vie en société.

Bulles de Culture : Concernant la sortie de votre prochain film, “Hors saison“, beaucoup diront qu’il marque une rupture avec vos propositions précédentes, axées sur le social. Cependant, on oublie que vous en êtes à votre 10e film et que vous n’avez pas exclusivement traité de sujets sociaux. Il semble y avoir une certaine continuité dans la psychologie de vos personnages, tous portés par une forme de désillusion. Avez-vous remarqué cela ?

Stéphane Brizé : C’est exactement cela ! Lorsque je réalise des films tels que “La Loi du marché“, “En guerre“, “Un autre monde” et “Une vie“, on peut dire que c’est ma période de désillusion. Je n’en suis pas conscient au moment de les créer. C’est en sortant de ces projets, en constatant l’état dans lequel je me trouve, que je prends conscience de ma propre situation. J’ai brassé cette matière et me retrouve alors dans la même tourmente que le personnage de Guillaume Canet dans le film.

“Les personnages de ma filmographie sont cousins”

Durant la période du Covid, le monde s’est arrêté. Je me suis alors posé des questions profondes, parfois désagréables. Cependant, il est nécessaire de les affronter pour progresser. La seule légitimité que je m’accorde est celle de faire des films. Je ne veux pas être le dépositaire d’un genre particulier. On me présentait souvent comme “Brizé, le cinéaste des silences“. C’était bienveillant, mais je considère que ce sont des raccourcis. Comme vous le soulignez, j’ai l’impression que tous les personnages de ma filmographie, qu’il s’agisse de films sociaux ou non, sont cousins.

hors saisons photo avis critique
Copyright Gaumont / Alamode Film

“J’ai l’impression générale que les hommes sont plus lâches que les femmes”

Bulles de Culture : Pourquoi avoir décidé de collaborer avec Marie Drucker à l’écriture du scénario ?

Stéphane Brizé : C’est quelqu’un que je connaissais depuis un certain temps, bien avant “Un autre monde” dans lequel elle joue. Cependant, ce film nous a permis de nous apprécier énormément. J’ai été séduit par son intelligence, sa drôlerie et son regard extrêmement pertinent sur le monde qui l’entoure.

Lors d’un rendez-vous entre nous, nous avions entamé une discussion franche sur la différence entre hommes et femmes. C’est peut-être un raccourci, mais j’ai l’impression générale que les hommes sont plus lâches que les femmes. Après cette discussion, nous nous sommes dit que le jour où j’aborderais un film sur le couple, je l’appellerais pour le faire ensemble.

Marie accueille en elle toute ma part de féminité. En disant cela, je me demande si je ne suis pas un peu dépassé. C’est peut-être une vision archaïque, mais c’est une vision qui m’appartient. C’est probablement la conséquence d’un patriarcat éhonté de centaines de milliers d’années.

“Un dialogue constant s’est instauré entre la musique et les images”

Bulles de Culture : Vincent Delerm a composé la musique du film. Cette dernière participe grandement à l’histoire. Comment avez-vous travaillé ensemble ?

Stéphane Brizé : Je fais toujours composer la musique pendant que j’écris, avant le tournage. Je considère la musique comme une composante essentielle de l’écriture. Je pense que la musique est le langage le plus universel, capable d’évoquer quelque chose pour l’être humain, indépendamment des barrières linguistiques. J’ai contacté Vincent Delerm, que je ne connaissais pas, après avoir écouté ses compositions pour le film de Suzanne Lindon, “Seize printemps“.

Il ne compose que rarement pour des films. Or, je n’aime pas forcément faire appel à des professionnels de la musique de film, donc cette collaboration me convenait parfaitement. Je lui ai simplement exposé brièvement ce que j’étais en train d’écrire : l’histoire d’un homme et d’une femme qui se sont aimés il y a quinze ans, qui se sont séparés, qui ne se sont plus revus, et qui se retrouvent par hasard hors saison dans une station balnéaire déserte.

Vincent est parti en studio avec cette idée. Lorsque j’ai reçu les morceaux qu’il avait composés sur cette base, j’ai tout de suite compris qu’il avait saisi le sens profond de ce que je lui avais raconté. Il a su révéler une atmosphère et un parfum propres aux personnages. J’ai constamment eu sa musique dans les oreilles à toutes les étapes de la production du film. Elle m’inspirait. Ainsi, un dialogue constant s’est instauré entre la musique et les images.

En savoir plus :

  • Festival CitéCiné de Carcassonne du 11 au 15 janvier
  • Date de sortie du Film : 20/03/2024
  • Distributeur : Gaumont
Antoine Corte
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