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Rencontres ARP 2023 : l'audiovisuel à l'horizon 2030
© Susy Lagrange

Rencontres ARP 2023 / Quel avenir pour le cinéma à l’horizon 2030 ?

Dernière mise à jour : novembre 13th, 2023 at 02:12 pm

La question de l’avenir de l’audiovisuel français à l’horizon 2030 s’est posée aux Rencontres cinématographiques de l’ARP (Société civile des Auteurs, Réalisateurs, Producteurs) organisées du 8 au 10 novembre au Touquet-Paris-Plage. Compte rendu des discussions. 

Rencontres ARP 2023 : Une transformation très claire du marché

Il n’y aura jamais trop de films en France (député Quentin Bataillon)

Le député Quentin Bataillon (Renaissance) salue en introduction du débat que le modèle français « a réussi à mettre la salle au centre de la création ». Avec le retour du public en salles, l’élu revient sur l’incessant débat du nombre de films sortis en salle affichant son soutien à la diversité : « Il n’y aura jamais trop de films en France. Je suis persuadé que s’il y a moins de films, il y aura moins de diversité et donc moins d’émergence et de fait, pas la même exception française. »

Face à la montée des plateformes, le président de l’Arcom (anciennement  CSA), Roch-Olivier Maistre, souligne la place toujours prépondérante des éditeurs historiques dans le financement du cinéma, dont Canal+ qui reste à ce jour le premier financeur des œuvres audiovisuelles françaises. Néanmoins, le régulateur de l’audiovisuel constate une transformation très claire du marché : « La télévision ne cesse de perdre en heures d’écoute, tandis que son public vieillit. À l’inverse, les plateformes de streaming occupent aujourd’hui une place importante dans les foyers français ».

Parmi la multiplicité des plateformes qui arrivent sur le marché, à l’exception de Netflix, aucune ne gagne de l’argent (Maxime Saada)

Maxime Saada, président du directoire du groupe Canal+, alerte sur la dangerosité de la stratégie actuelle des plateformes : « Parmi la multiplicité des plateformes qui arrivent sur le marché, à l’exception de Netflix, aucune ne gagne de l’argent. Aussi, actuellement, celles-ci ne sont pas constructives de valeur, elles la détruisent plutôt en fragilisant les acteurs établis ».

Le dirigeant de la chaîne payante constate le rapprochement inévitable entre TV et plateforme : « Les plateformes optent désormais pour des séries bouclées, produisent elles-mêmes des œuvres, organisent des rendez-vous très proches de la télévision, s’orientent vers le flux et se lancent dans des modèles publicitaires. À l’inverse, les chaînes hertziennes consolident leur stratégie vers le streaming ».

Maxime Saada réaffirme cependant l’importance de la salle pour le cinéma, adressant un message à son confrère de France Télévisions, également présent, qui souhaite proposer gratuitement des films sur la plateforme de streaming des chaines publiques : « J’ai toujours cru que le vecteur principal pour le cinéma est la salle. On ne doit aucunement laisser croire que le cinéma est gratuit ».

Rencontres ARP 2023 : l'audiovisuel à l'horizon 2030 au micro Stéphane Sitbon-Gomez, France Télévision
© Susy Lagrange – Stéphane Sitbon-Gomez, directeur des antennes et des programmes de France Télévisions

Je ne cherche à affaiblir personne (Stéphane Sitbon-Gomez)

Pour Stéphane Sitbon-Gomez, directeur des antennes et des programmes de France Télévisions, il est important de ne pas négliger le non-linéaire dans les développements de l’audiovisuel public, jugeant qu’il serait dommage de « le faire sans le cinéma. Cela serait extrêmement triste pour le public ». Le représentant de France Télévisions réfute les allégations de son homologue privé pour qui la diffusion du cinéma sur la plateforme gratuite de France Télé nuirait à son modèle payant : « Je ne cherche à affaiblir personne. Le service public se porte bien lorsque Canal+ se porte bien. En 2030, le linéaire sera moins puissant. Dès lors, TF1, France Télévisions et Canal+ doivent faire exister leur propre plateforme et assurer leur numérisation. Et cela passera par une offre large de cinéma sur les antennes de chacun ».

Les plateformes n’ont pas eu d’elles-mêmes la volonté d’investir en France (Isabelle Madelaine)

La productrice et vice-présidente déléguée de l’UPC (Union des Producteurs de Cinéma et de Contenus Publicitaires), Isabelle Madelaine, se félicite d’avoir obtenu des plateformes qu’elles contribuent au financement des œuvres françaises, avec un petit bémol : « Les plateformes n’ont pas eu d’elles-mêmes la volonté d’investir en France. Elles y ont été contraintes ».

Alors que le financement du cinéma français a longtemps été régi par des décrets avec des obligations adressées aux éditeurs/diffuseurs, Édouard Mauriat, producteur et vice-président du SPI (Syndicat des Producteurs Indépendants), souligne que l’ère réglementaire est désormais révolue : « Nous ne nous basons désormais plus sur les décrets pour faire investir les partenaires dans le cinéma français. Nous passons des accords, notamment avec Canal+, TF1, M6. Il nous reste certains à signer, comme avec France Télévisions ».

Suite à un accord signé avec le cinéma français dans lequel le groupe Canal+ s’est engagé à investir un montant total forfaitaire de 570 M€ sur la période 2022-2024 dans la production de films européens, Maxime Saada réagit aux commentaires du producteur : « Chez Canal+, on a besoin de s’inscrire dans la durée pour nos investissements. On ne peut pas tous les deux ans remettre en danger nos investissements avec le risque de donner plus de droits aux plateformes, notamment s’agissant de leur fenêtre d’exploitation. Si c’était possible, je me serais engagé sur des accords encore plus longs ».

Actuellement en pleine acquisition des chaînes OCS, la filiale de Vivendi s’est même dite prête à cumuler les investissements des chaînes OCS et des chaînes Canal+ si « les producteurs lui donnaient les garanties nécessaires pour assurer la pérennité du modèle proposé par le groupe Canal+ face aux plateformes de streaming ».

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Antoine Corte

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