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[Critique] “Phoenix” (2014) : Renaître de ses cendres

Dernière mise à jour : avril 5th, 2019 at 01:34 am

Première scène, on y voit une route dans la nuit avec un point de contrôle en Allemagne monté par les soldats américains juste après la fin de la guerre. Ces derniers, dont la cruauté crée l’ambiguïté avec les Nazis, arrêtent une voiture contenant deux femmes rescapées des camps de concentration. L’une d’elle a le visage recouvert de bandages qu’on l’oblige à retirer : une introduction de génie. En effet, le réalisateur Christian Petzold provoque, à travers son film Phoenix, une réflexion poussée sur la quête de l’identité perdue. L’avis et critique film de Bulles de Culture.

Synopsis :

Nelly Lenz (Nina Hoss) a été complètement défigurée à Auschwitz. Dès la libération, elle entreprend une reconstruction faciale qui l’éloigne quelque peu de son visage d’antan. Avec l’aide de son amie juive, Lene (Nina Kunzendorf), Nelly part à la recherche de son mari, Johnny (Ronald Zehrfeld) qu’elle a perdu au moment de sa déportation. Alors qu’elle retrouve sa trace, ce dernier ne la reconnaît pas. Il lui prête simplement une vague ressemblance avec son épouse…

Phoenix : une quête d’identité

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© Christian Schulz

Il est très difficile de filmer l’amour au cinéma. Là où le cinéma américain tire les grosses ficelles à coup d’effusions sentimentales souvent malvenues, Christian Petzold choisit de montrer dans le long métrage Phoenix ce sentiment sous l’angle de la parcimonie, sous la réserve de la pudeur : un simple regard de Nelly lorsqu’elle redécouvre son époux, la manière dont elle le serre dans ses bras lorsqu’elle monte sur son cyclomoteur ; mais c’est surtout la déception de cette femme, déjà meurtrie par les camps, qui constate que Johnny ne la reconnaît pas d’un premier regard et pire qu’il souhaite l’utiliser pour gagner de l’argent…

En ce sens, le réalisateur s’inspire d’un texte écrit par Alexander Kluge, Une expérience d’amour, qui raconte l’histoire d’un couple de juifs passionnément amoureux à Auschwitz épiés par des médecins nazis. Simple et efficace, la construction dramatique met en avant cette quête d’identité à travers ce sentimentalisme. Elle pousse son personnage principal dans un cycle de douleurs psychologiques inextricables, démontrant que l’être humain peut survivre à de grands maux.

Une réflexion d’une richesse infinie

En contrepied des souffrances de son personnage, l’actrice Nina Hoss choisit d’interpréter son rôle avec un jeu minimaliste tout en finesse. Elle ne montre aucune fêlure apparente.Le concept de la transformation physique est également une thématique profonde dans ce film. Il est issu de certaines problématiques déjà abordées par Pedro Almodóvar, notamment dans son La piel que habito. Il est source de transfert pour le spectateur à tel point qu’on se demande quelles seraient les réactions si on changeait du jour au lendemain complètement de visage.

D’un calme absolu sur l’aspect sonore, l’histoire est pourtant hantée par une mélodie récurrente, tirée de la chanson Speak Low, qui est la résurgence d’un bonheur sauvegardé pour la protagoniste. De la même façon, la mise en scène, épurée, est concentrée sur les acteurs. Seule exception, la caméra s’aventure sur quelques rares plans dans un décor plus vaste, reconstituant une Allemagne en ruine.Le film est ainsi d’une beauté absolue. Il ne parle que de sentiments ouvrant ainsi le panel à une réflexion d’une richesse infinie.

En savoir plus :

  • Date de sortie France : 28/01/2015
  • Distribution France : Diaphana Distribution
Antoine Corte

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