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Dernier jour d’un condamné François Bourcier affiche

[Critique] “Le dernier jour d’un condamné” par François Bourcier

Dernière mise à jour : avril 11th, 2019 at 04:41 pm

S’attaquer à un texte phare de la littérature française, Le dernier jour d’un condamné, d’un auteur monument comme Victor Hugo, voilà le défi qu’ont voulu relever François Bourcier et William Mesguich. L’avis et critique théâtre de Bulles de Culture sur cette adaptation.

Synopsis :

Avec cette adaptation de Le dernier jour d’un condamné de Victor Hugo, François Bourcier place sur le devant de la scène la question encore brûlante, ne l’oublions pas, de la peine de mort. Dans la petite salle, intime et confinée, du Studio Hébertot, William Mesguich interprète cet homme qui ne sortira de sa cellule que pour y voir le couperet de la guillotine.

Le dernier jour d’un condamné  : « Un plaidoyer pour l’abolition de la peine de mort »

Dernier jour d’un condamné François Bourcier image William Mesguich 2
© Chantal Depagne

Un plaidoyer pour l’abolition de la peine de mort”, c’est ainsi que l’écrivain Victor Hugo présente Le dernier jour d’un condamné dans la préface de la seconde édition. Le metteur en scène François Bourcier l’a compris. Si Victor Hugo raconte les dernières semaines de ce misérable criminel sans que l’on ne connaisse jamais son crime, c’est pour accuser la torture morale et physique que la société inflige aux condamnés à mort. Le metteur en scène place ainsi le spectateur du Studio Hébertot au plus près de la conscience de cet homme, entre moments de lucidité, instants de panique et combats avec les souvenirs qui trop souvent le ramènent à la vie.

L’acteur William Mesguich n’a que quelques mètres carrés pour jouer : sa cellule est représentée par un modeste carré blanc au sol et une seule petite fenêtre qui vient percer un mur à l’arrière. L’acteur se débat dans cet espace où l’approche de sa mort ponctue chaque scène : à plusieurs reprises, William Mesguich, comme pris de folie, tourne la tête face public, mime un hurlement et le mouvement de la tête qui tombe. La guillotine se rapproche. Le metteur en scène François Bourcier accompagne ces mimiques d’éclairs verts et de bruits assourdissants. C’est d’ailleurs peut-être un peu trop car le message est compris par le public alors que le jeu se fait insistant.

Une mise en scène excessive ?

François Bourcier et William Mesguich ont ainsi bien compris l’œuvre de Hugo, mais nous regrettons parfois leur volonté de tout expliquer, de tout expliciter et de tout illustrer, au risque parfois de tomber dans le ridicule… Le condamné à mort dans Le dernier jour d’un condamné est aussi mari et père : William Mesguich fait affleurer la douleur paternelle, et cela fait du bien de l’entendre sincère, posé et touchant, au contraire des moments où l’acteur se réfugie dans le cri pour faire comprendre aux spectateurs la douleur du condamné. Mais quand sa petite Marie lui vient à l’esprit, il murmure et devient l’homme candide que l’enfance attendrit. Le spectateur ne voit plus le condamné : il y voit la victime de la société. Le parti pris de Mesguich et Bourcier est alors ici réussi.

Mais les deux artistes auraient dû s’arrêter là : pourquoi projeter sur le mur de la cellule, au moment où les sentiments naissent d’eux-mêmes par l’interprétation de l’acteur, des photos familiales en noir et blanc et un film avec une petite fille jouant au ballon sur la plage ? La mise en scène souligne trop, là où elle devrait laisser libre cours au ressenti et à l’interprétation du public.

William Mesguich à l’avant-scène

Dernier jour d’un condamné François Bourcier image William Mesguich
© Chantal Depagne

Nous saluons tout de même les instants justes et délicats dans  la pièce de théâtre Le dernier jour d’un condamné où l’acteur William Mesguich, rompant l’illusion théâtrale et réussissant à s’extirper de la cellule, décide de jouer certains passages du texte à l’avant-scène. L’acteur s’adresse alors directement au public et la petite salle du Studio Hébertot permet parfaitement ces instants de complicité avec le spectateur. Le condamné commente ainsi sa propre histoire, explique combien elle est importante pour le sort de la société : n’est-ce pas elle qui au moment où elle tue le criminel, devient à son tour criminelle ?

Dommage que ces minutes de répit, où William Mesguich est simple et convaincant, ne soient pas plus nombreuses…

En savoir plus  :

  • Le dernier jour d’un condamné au festival Avignon Le Off 2018, du 6 au 29 juillet à 14h45 au Théâtre La Condition des Soies. Relâche le 16 juillet
  • Le dernier jour d’un condamné, d’après Victor Hugo, adaptation de David Lesné, avec William Mesguich, mise en scène François Bourcier, au Studio Hébertot du 29 août au 4 novembre 2017 (du mardi au samedi à 19h, dimanche à 17h, relâche le 15 septembre)
Agathe Giraud

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