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La Vie de Galilée par par Claudia Stavisky image théatre contemporain
© Simon Gosselin

Critique / “La Vie de Galilée” de Brecht par Claudia Stavisky

Dernière mise à jour : juin 7th, 2021 at 12:00 am

Après son fameux Cyrano en 2016, La Résistible Ascension d’Arturo Ui (Brecht, déjà !) en 2017 et J’ai pris mon père sur mes épaules en 2018, Philippe Torreton était à La Comédie de Saint-Étienne pour renouer avec la langue politique et ciselée de Bertolt Brecht. La Vie de Galilée est mise en scène par Claudia Stavisky. Quarante personnages et onze comédiens : une fresque impressionnante. L’avis et la critique théâtre de Bulles de Culture.

Synopsis :

“En l’an de grâce 1609 à Padoue / La clarté du savoir jaillit d’un pauvre bougre / Galileo Galilei calcula tout / Ce n’est pas le soleil mais la Terre qui bouge”. C’est ce combat de la vérité, mené par Galilée tout au long de sa vie que retrace Brecht dans cet immense poème, traduit par Eloi Recoing, écourté en 15 tableaux. Non, la Terre n’est pas le centre du monde, n’en déplaise à l’Inquisition !

La Vie de Galilée : un combat politique

Comment passer de l’obscurantisme aux Lumières ? C’est tout le propos de La Vie de Galilée de Brecht. Toute sa vie, ce physicien italien, génial repreneur de l’invention de la lunette astronomique, va devoir lutter contre le pouvoir de l’Église. Déjà Copernic avait amorcé le combat. Mais Galilée détient enfin les preuves de l’héliocentrisme. Dans sa mise en scène épurée, esthétique et efficace, Claudia Stavisky retrace cette Vie de Galilée jonchée de censure à Padoue ou au Vatican, en passant par Florence.

Ces voyages maritimes  sont soulignés par les créations vidéos originales de Michaël Dusautoy. Et Franck Thévenon, lui, chargé des lumières, habille le cabinet de Galilée de ciels étoilés, ou de clairs obscurs, dignes des plus grands peintres flamands. Le pouvoir de l’Inquisition toute puissante est d’ailleurs accentué par une immense croix lumineuse qui éclaire le fond de scène. Lili Kendara est chargée des costumes : les religieux y sont ridiculisés par des accoutrements parfois un peu caricaturaux. L’un d’eux, tel une araignée venimeuse se déplace même penché en avant à l’aide de deux cannes. Michel Hermon quant à lui fait une apparition loufoque habillé en général SS pour élargir le propos de l’obscurantisme à tous les siècles.

Et dire que la papauté n’admettra qu’en 1830 que la Terre n’est pas le centre du monde ! Entre peur du bûcher et volonté de crier la vérité, Galilée formera des disciples qui seront ses ambassadeurs pour l’avenir. Au-delà d’une simple reconstitution d’un destin, Bertolt Brecht nous rappelle sa volonté infinie de lutter contre toutes les formes d’autoritarisme.

Une performance

Forcément, le propos engagé de cette Vie de Galilée ne pouvait que toucher la fibre politique de Philippe Torreton. Quelle performance ! Presque 3 heures sans quitter les planches puisqu’il est au plateau dès que le public entre dans la salle. Dans la force de l’âge au début de la pièce, son Galilée est enthousiaste, bon vivant. Il fait exploser la théorie des sphères de cristal d’Aristote. Il remplit avec frénésie son rôle de guide scientifique auprès d’Andréa, son petit disciple.

Puis, tout au long des 15 tableaux, Philippe Torreton se transforme physiquement. Il finit voûté, affaibli, accablé par le poids de l’Inquisition et de ses tortures morales ou physiques. A noter qu’il est épaulé sur scène par sa fille, Marie Torreton, qui joue Virginia, la fille bigote de Galilée. Même si ce dernier abjure,  le Saint-Office ne gagnera finalement pas. Andrea, son fidèle élève, va publier en Hollande les travaux de son maître. La vérité pourra enfin éclater en Europe.

“Qui ne connaît la vérité n’est qu’un imbécile.  Mais qui la connaissant la nomme mensonge, celui-là est un criminel !” C’est pour ne pas être un criminel que Galilée va mener son odyssée, poursuivi par les flammes de l’Inquisition. Du théâtre engagé  et nécessaire pour combattre encore de nos jours toutes les formes d’obscurantisme.

En savoir plus :

Frédérique C.

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