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Critique Cannes 2022 / "Sans filtre" (2022) de Ruben Östlund : vomissements jouissifs 1 image
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Critique Cannes 2022 / “Sans filtre” (2022) de Ruben Östlund : vomissements jouissifs

Après avoir obtenu la palme d’or pour The Square, sur la spéculation dans le milieu de l’art contemporain, Ruben Östlund revient avec Sans filtre (Triangle of Sadness), une comédie satirique qui s’attaque à la lutte des classes et au monde des influenceurs. La critique et l’avis de Bulles de Culture. 

Synopsis :

Après la Fashion Week, Carl (Harris Dickinson) et Yaya (Charlbi Dean Kriek), couple de mannequins et influenceurs, sont invités sur un yacht pour une croisière de luxe. Tandis que l’équipage est aux petits soins avec les vacanciers, le capitaine refuse de sortir de sa cabine alors que le fameux dîner de gala approche. Les événements prennent une tournure inattendue et les rapports de force s’inversent lorsqu’une tempête se lève et met en danger le confort des passagers.

Sans filtre : une satire multifacette

En partageant son récit en trois parties, Ruben Östlund va faire de son Sans filtre une satire multifacette qui traite des bassesses du monde des puissants et de la vengeance programmée des “petits gens”. L’oeuvre débute sur le casting de Carl passant pour devenir mannequin pour une marque de vêtements de luxe. Dans ce milieu où l’apparence fait la fortune, les femmes gagnent exceptionnellement plus que les hommes. Ruben Östlund se sert de cette situation salariale atypique pour mettre en scène son protagoniste et sa copine, Yaya, se disputant pour savoir à qui il revient de payer l’addition au restaurant. Carl, outré de devoir toujours payer pour la jeune femme, lui demande de régler la note. Le comportement de Yaya s’inscrit à l’inverse dans une logique patriarcale où il est d’usage que l’homme sorte la carte bleue.

La deuxième partie est de loin la plus acide. Carl et Yaya sont invités sur un yacht de luxe où se côtoient oligarques russes alcooliques, retraités fortunés ayant travaillé dans le commerce d’armes où allemande excentrique. En bas de ce microcosme se trouvent les personnels de bord qui se plient aux exigences de leurs hôtes. Dans cette hiérarchie, il y a les femmes de chambre qui arrivent sur la dernière barre dans l’ordre d’importance, invisibles aux yeux des autres car ne servant qu’à récurer les salles de bain en marbre. Au cours d’une monstrueuse tempête, tout le monde est malade. Ruben Östlund s’autorise alors une explosion de vomissements et de diarrhées où l’on voit ces riches individus se rouler dans leur caca. La moquette du yacht est souillée à l’excès, provoquant à la fois polémique et hilarité. On adore pourtant cette incursion Gastambidienne dans le milieu du cinéma d’auteur.

Dans la dernière partie, le bateau coule. Sans Filtre renverse alors les rapports de classe.  Une femme chambre rescapée se place leader d’une communauté matriarcale qu’elle impose aux rescapés du bateau échoués sur une île déserte. Quelques longueurs sont à retenir sur ce pan d’histoire qui révèle pourtant la vraie portée du film de Ruben Östlund. 

Tourné sur un yacht emblématique

Dans Sans filtre, on retrouve aisément la patte du réalisateur révélé par Snow Therapy qui étire au maximum ses scènes pour se nourrir du malaise provoqué par le conflit entre ses personnages. Souvent provocateur, il sait savamment doser pour être toujours à cheval entre la comédie et le malsain, à l’instar de l’homme gorille qui venait s’inviter dans un diner chic dans une scène mythique de The Square.

La recherche du décor est ici minutieuse et symbole d’une société de classe qu’il critique. En effet, le film choisit l’ancien yacht du milliardaire Onassis pour tourner ses scènes maritimes. Ce luxueux bateau a tout une histoire puisqu’il accueillit l’élite des années 60 et 70. Churchill lui-même aimait y passer son temps de villégiature.

Notre avis sur le film Sans Filtre

Avec Sans Filtre, Ruben Östlund signe un film au message peu original mais avec un traitement jouissif abordé avec tout l’irrévérence qu’on peut connaitre au suédois. Et On aime tellement quand une étude sociologique peut être obtenue à coups de chiottes qui débordent.

En savoir plus :

  • Date de sortie France : prochainement
  • Distribution France : Bac Films
Antoine Corte

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