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Affiche film critique Brooklyn Yiddish

[CRITIQUE & INTERVIEW] “Brooklyn Yiddish” : Immersion parmi les juifs hassidiques

Dernière mise à jour : avril 18th, 2021 at 03:06 pm

Brooklyn Yiddish de Joshua Z. Weinstein a été présenté en compétition du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2017. A cette occasion, nous avons rencontré son réalisateur. Notre avis sur le film et notre interview du réalisateur. 

Synopsis :

Borough Park, quartier juif ultra-orthodoxe de Brooklyn.
Menashé (Menashe Lustig), modeste employé d’une épicerie, tente de joindre les deux bouts et se bat pour la garde de son jeune fils Ruben. En effet, ayant perdu sa femme, la tradition hassidique lui interdit de l’élever seul.
Mais le Grand Rabbin lui accorde de passer une semaine avec son fils ; l’ultime occasion pour Menashé de prouver qu’il peut être père dans le respect des règles de sa communauté.

Brooklyn Yiddish, immersion totale dans la communauté des juifs hassidiques

 

Brooklyn Yiddish photo film critique
© D.R.

Brooklyn Yiddish est une immersion totale dans la communauté très fermée des juifs ultra-orthodoxes, dits “hassidiques”. Ce courant fondamentaliste n’a été que très peu montré au cinéma jusqu’à présent. Cette découverte est le principal attrait du film. Comme toute communauté, elle possède ses propres règles : “Les rabbins sont l’autorité de cette communauté. Les personnes doivent se plier aux règles dictées par ces derniers. Dès lors que les individus n’ont pas envi de quitter cette communauté, il faut se plier aux dogmes imposés pour éviter de se faire rejeter par les autres” selon le réalisateur.

Joshua Z. Weinstein Brooklyn Yiddish critique photo
© Oblikon.net

La portée du film Brooklyn Yiddish n’est que très peu accessible. Il est difficile de trouver ses repères dans cet univers aux rouages très peu expliqués. Pourtant, le réalisateur s’est complètement immergé parmi les juifs hassidiques pour faire son film. Il confie avoir voulu retranscrire au plus près la tradition de ce peuple.

Ainsi, il fait appel à des comédiens non professionnels n’ayant “pas demandé l’autorisation à leurs rabbins pour tourner” et décide de tourner en langue yiddish alors qu’il ne la comprend pas lui-même. L’anecdote la plus touchante reste que le jeune comédien principal n’était “jamais rentré dans une salle de cinéma” avant de tourner devant la caméra de Joshua Z. Weinstein. Impossible de réellement parler de directions d’acteurs quand on demande à ce jeune intervenant d’être finalement lui-même. Le réalisateur indique “avoir recherché énormément de crédibilité dans ce film : la barbe, les vêtements, la gestuelle de ces pratiquants“. Il ne pouvait pas se permettre de “mettre Brad Pitt avec une barbe dans son film“. Néanmoins, le cinéaste avoue ne pas avoir fait un documentaire : ‘il était notamment impossible d’envisager de tourner dans les rues avec ces juifs hassidiques“.

Un réalisateur muselé par le poids de la crédibilité

 

Brooklyn Yiddish photo film critique
© D.R.

On a du mal à trouver véritablement un point de vue personnel au film. Cela vient peut-être du fait que le producteur est lui-même hassidique. Le réalisateur semble muselé dans une objectivité qu’il doit respecter. Du coup, le personnage de Menashé manque d’audace. Il restera emmuré dans une indécision profonde dont on ne trouve pas les clés de la résolution. Joshua Z. Weinstein indique lui-même “ne pas avoir un regard engagé sur cette communauté“.

On aurait aimé une prise de position plus osée du réalisateur sur le mode de vie de cette communauté. Dommage que l’opinion du réalisateur ne transparait en filigrane que dans quelques brides de dialogues ayant trait notamment à la condition féminine. Ces dernières ne peuvent pas conduire, doivent tenir la maison et faire la vaisselle. Pour autant, Joshua Z. Weinstein nous indique avoir “fait le film qu’il désirait“. Pour lui, il ne s’agissait pas d’avoir une opinion sur des choix de vie, mais plutôt d’évoquer le conflit intérieur d’un homme qui doit vivre avec son fils après le décès de sa femme. “Le thème principal de mon film est le deuil” selon le cinéaste.

On restera frustré par Brooklyn Yiddish qui n’exploite pas assez ces enjeux dramatiques de départ. On aurait aimé un point de vue plus affirmé sur ce protagoniste qui est confronté au dilemme très cinématographique entre l’amour paternel et le poids de la religion.

 

En savoir plus :

Antoine Corte

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