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[Critique] “Le Fils de Saul” (2015) : L’enfer du génie

Dernière mise à jour : mai 25th, 2019 at 04:27 pm

Présenté au Festival de Cannes 2015, Le Fils de Saul (Saul Fia) de László Nemes est reparti avec le Grand prix du jury mais aussi le Prix FIPRESCI (prix de la critique internationale), le Prix François Chalais (prix pour les films reflétant la réalité du monde) et le Prix Vulcain de l’artiste technicien (prix de la Commission supérieure technique de l’image et du son pour mettre à l’honneur un “artiste-technicien”). L’avis et la critique film de Bulles de Culture sur un film qui va remuer les estomacs fragiles des spectateurs.

Synopsis :

En Octobre 1944, dans le camp d’Auschwitz-Birkenau, Saul Ausländer (Géza Röhrig), membre du Sonderkommando, un groupe de prisonniers juifs particuliers chargé d’assister les nazis dans la gestion du camp. Il doit notamment nettoyer les chambres à gaz après que les allemands ait tué ses occupants. Dans la foule de cadavre, Saul croit reconnaître le corps de son fils. Il va tout faire pour enterrer sa dépouille dans la tradition de la Torah.

Le Fils de Saul : un tournage en 35mm, le format du souvenir

Le fils de Saul - Laszlo Nemes - Photo 3
© AdVitam

Le Fils de Saul a le mérite d’apporter des propositions intéressantes tant d’un point de vue technique, que sur le plan scénaristique. Soucieux de conserver les valeurs premières du cinéma, László Nemes choisit de tourner son film en 35mm, quelques copies seront d’ailleurs disponibles dans ce format. Il redonne ainsi à son image authenticité et singularité, se dégageant de la technique numérique qui pourrait être en décalage avec la violence historique de son propos.

Une technique qui mise sur le plan rapproché

Le fils de Saul - Laszlo Nemes - Photo 1
© AdVitam

Au plus près des personnages, le cinéaste filme ses personnages caméra à l’épaule uniquement en plans rapprochés, laissant un flou sur le reste de l’image. Par exemple, dans la scène d’introduction, on ne voit pas distinctement les victimes se déshabiller pour rentrer dans les fours crématoires. On devine subrepticement les corps allant à la mort. Le visuel est couplé à des cris de désespoir au moment du gazage.  Le ressenti du spectateur est à son paroxysme. Il y a ce malaise qui est d’autant plus important qu’aucun film n’a jamais osé être aussi proche de ces chambres à gaz au moment des exécutions. Dans Le Fils de Saul, on les pénètre littéralement. László Nemes a ainsi ce génie artistique de nous montrer l’immontrable.

Une quête d’identité

Le fils de Saul - Laszlo Nemes - Photo 2
© AdVitam

Sur le plan dramaturgique, on est avec Le Fils de Saul dans une histoire à portée universelle : la thématique du père qui veut enterrer son fils. Le réalisateur prend le parti d’humaniser des êtres qui semblent avoir perdu toute identité en rentrant au service des nazis. L’appel tous les matins, les prisonniers qui tentent de créer des liens entre eux, l’angle scénaristique est celui de l’individualisme pris dans l’engrenage du chaos de la guerre. Pourtant, cette humanisation semble éphémère dans le récit de László Nemes puisqu’il introduit vite le doute dans l’esprit de son spectateur. L’enfant mort est-il bien le fils de Saul où n’est-il que le reflet de l’imaginaire du protagoniste qui souhaite, à travers le concept de famille, retrouver sa propre identité ?  Ce point de vue, accompagné par une mise en scène parfaite, nous fait passer un moment dérangeant mais salvateur.

En savoir plus :

  • Date de sortie France : 04/11/2015
  • Distribution France : Ad Vitam
Antoine Corte

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