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La Passion Van Gogh de Dorota Kobiela et Hugh Welchman affiche film d'animation cinéma

♥ [Critique] “La Passion Van Gogh” (2017) : une expérience sublime

Dernière mise à jour : octobre 31st, 2019 at 10:45 pm

Inspiré de la vie du célèbre peintre, le film d’animation La Passion Van Gogh (Loving Vincent) se construit à partir des toiles de l’artiste mises en animation et recomposées. Dorota Kobiela et Hugh Welchman nous offrent ainsi un moment grandiose au cœur des derniers moments du peintre. La Passion Van Gogh est à découvrir sur ARTE ce mercredi 30 octobre 2019 et à ne pas rater. L’avis et la critique film de Bulles de Culture sur ce long métrage coup de cœur, lauréat du Prix du public au Festival d’Annecy en 2017.

Synopsis :

Nous sommes en 1891. Vincent Van Gogh (la voix de Robert Gulaczyk en version originale) est mort. Joseph Roulin (la voix de Chris O’Dowd en V.O.), ingénieur des postes à Arles et ami de Vincent, charge son fils Armand (la voix de Douglas Booth en V.O.) de remettre à Théo Van Gogh (la voix de Cezary Lukaszewicz en V.O.) l’ultime lettre que lui a adressée son frère. Armand résiste d’abord puis s’engage dans la mission. Il apprend du père Tanguy (la voix de John Sessions en V.O.), le célèbre marchand de couleurs du tout Paris, la mort de Théo. Il se rend alors à Auvers-sur-Oise, village où officie le docteur Gachet (la voix de Jerome Flynn en V.O.) et où Vincent Van Gogh a passé ses derniers moments, afin de rencontrer les dernières personnes qui l’ont entouré : le docteur Gachet, sa fille Marguerite (la voix de Saoirse Ronan en V.O.), Louise Chevalier (la voix de Helen Mc Crory en V.O.), la gouvernante des Gachet, Adeline Ravoux (la voix d’Eleanor Tomlinson en V.O.), fille des propriétaires de l’auberge où séjourne Vincent, le batelier (la voix d’Aidan Turner en V.O.), le docteur Mazery (la voix de Bill Thomas en V.O.), etc. L’enquête est ouverte !

La Passion Van Gogh : un pur bijou visuel

La passion Van Gogh de Dorota Kobiela et Hugh Welchman image film d'animation cinéma
© 2017 Loving Vincent Sp.z.o.o. / Loving Vincent Ltd

Le générique se déroule à peine que l’on est déjà emporté-e par les traits de la célèbre Nuit étoilée. Les paysages bougent, se recomposent, les plans sont mobiles et efficaces, et chaque moment laisse entrevoir le détail ou le paysage d’une des toiles de l’artiste. C’est d’Arles que nous partons avec les personnages célèbres de Joseph Roulin et de son fils Armand. On entrevoit au cœur de querelles avinées Le Zouave (la voix de Josh Burdett en version originale) et La Mousmé (la voix de Holly Earl en V.O.). Le ton est donné.

Le film La Passion Van Gogh se poursuit, présentant une jolie galerie de portraits et une succession de décors envoûtants. On reste impressionné-e, savourant chaque image précieusement. Couleurs, traits, vue d’ensemble et détails, tout donne à penser que les tableaux de l’artiste sont en train de s’animer sous l’effet de la magie. Le format du film invite à se délecter de tous les détails des visages, des lumières, de tout ce qui fait la singularité de l’œil du peintre et de son art.

Reconnaissons la prouesse technique et la finesse du scénario. Car arriver à créer une animation à partir des toiles n’est pas rien — et en cela La Passion Van Gogh est une vraie pépite d’or ! — mais doubler cette prouesse technique d’un réel talent d’écriture, mêlant le romanesque à l’imaginaire de la fiction et ce que l’on sait des derniers jours du peintre, cela relève d’un talent singulier et épatant. De ces deux réussites naît un indéniable ensorcellement, et celui-ci opère efficacement.

Une fiction intimement liée à la biographie du peintre

La passion Van Gogh de Dorota Kobiela et Hugh Welchman image film d'animation cinéma
© 2017 Loving Vincent Sp.z.o.o. / Loving Vincent Ltd

La Passion Van Gogh s’articule autour d’une fiction : l’ultime lettre de Vincent à Théo n’est pas arrivée, il faut la lui rendre. Ce trait fictionnel permet au film de prendre l’allure d’une enquête : Armand cherche Théo, puis qui pourra le mettre en relation avec la veuve de Théo, et enfin si celui-ci s’est vraiment donné la mort. Que l’on connaisse de près ou de loin la vie de Van Gogh, on se laisser happer et prendre par l’intrigue que construit le film.

L’arrivée à Auvers-sur-Oise et les rencontres qu’Armand y fait fonctionnent bien. Que ce soit avec la distante Marguerite Gachet, dont on pense que le peintre était épris, avec la populaire Adeline de l’auberge, dont on pense qu’elle était éprise de lui, ou avec les anonymes tels que le batelier, le jeune homme au bleuet ou le vieux paysan. On se trouve, de fait, partie prenante de toutes les dernières toiles de l’artiste, et cela n’est pas sans émotion.

L’enquête d’Armand fait alterner le chatoiement des couleurs des toiles de Vincent Van Gogh avec des passages en tons de gris pour les flashback. Le contraste entre les deux, le rythme qui s’instaure dans la bascule de l’un à l’autre, tout cela marche. Tout cela marche remarquablement bien même ! On connaît l’issue de l’enquête et pourtant, on se prend au jeu des aveux, des dévoilements et des retournements de situation.

L’écriture est subtile, elle effleure les facilités avant de les laisser de côté, les grosses ficelles s’écartent vite. On entre dans l’ambiance des toiles, dans ce que l’on imagine avoir été les échanges du peintre avec celles et ceux qui se sont retrouvé-e-s sujets de sess tableaux. La complexité de tout être humain se trouve ainsi au cœur même de La Passion Van Gogh. Et le film se déroule tout en délicatesse autour de ses différents protagonistes.

La Passion Van Gogh : du suspense et du mystère

La passion Van Gogh de Dorota Kobiela et Hugh Welchman image film d'animation cinéma
© 2017 Loving Vincent Sp.z.o.o. / Loving Vincent Ltd

Tout en créant un fil fictionnel qui pose la question du suicide de Vincent Van Gogh, La Passion Van Gogh se rattache à tout ce qui a pu rendre difficile ses derniers temps pour le peintre. L’énigmatique docteur Gachet, que l’on connaît surtout par le portrait que Vincent Van Gogh a fait de lui, apparaît par exemple avec son ambiguïté: se voulant artiste, on le voit envier le peintre, s’attribuer ses plus belles toile puis et sa fille évoquer cette obsession qui le conduit à copier les œuvres du peintre — et qui est avérée.

C’est aussi au cœur des relations compliquées qui unissent Vincent à Théo que le film nous introduit. Entre saga familiale, relation de dépendance et de culpabilité, on explore les replis sombres et toxiques des liens entre les deux frères. Sans arriver à déterminer qui des deux admire le plus l’autre, ni qui des deux les conduit dans l’impasse, on entend des morceaux fameux du passionnant échange épistolaire qu’ils entretiennent.

La Passion Van Gogh évite, dans sa subtilité, les facilités qu’il peut y avoir à aborder la question du suicide. On se trouve même sans cesse déchiré-e entre la soif de rationalité du personnage d’Armand et l’évident caractère insaisissable des raisons du passage à l’acte et l’impossible explication de ses modalités. Faut-il un responsable ? Des responsables ? Le film apporte à cette inévitable question, qui entoure le suicide, une réponse belle d’humanité et de tendresse. La Passion Van Gogh est un film coup de cœur de Bulles de Culture.

En savoir plus :

  • La Passion Van Gogh est diffusée sur ARTE et en streaming sur arte.tv le mercredi 30 octobre 2019 à 20h55, puis le samedi 23 novembre 2019 à 02h00
  • Durée du film : 1h31
  • Prix du public au Festival d’Annecy en 2017
Morgane P.

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