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Rien ne saurait me manquer Compagnie Avant l’Aube image théâtre
© Laura Wojcik

♥ Critique / “Rien ne saurait me manquer” : une pièce à la quête des hautes lumières

Dernière mise à jour : décembre 12th, 2020 at 03:28 pm

La Cie Avant l’Aube vous présente sa nouvelle création Rien ne saurait me manquer au théâtre La Reine Blanche à Paris. Bulles de Culture a A-D-O-R-É ! C’est un coup de cœur. Notre avis et notre critique théâtre.

Synopsis :

Ils appartiennent à la génération Y ; ils appartiennent à une génération connectée ; ils appartiennent à une génération chanceuse. Cela rend-il la vie plus facile ? Non, car ils n’ont plus de modèle de vie tout tracé, plus de religion à laquelle se rattacher. Et dans une époque où tout va toujours plus vite, ils ont vu les impératifs se démultiplier. Alors comment vit-on face à ses rêves et ses doutes en 2018 quand on appartient à la génération Y ? C’est la question que pose Rien ne saurait me manquer.

Rien ne saurait me manquer : des retrouvailles émues avec la Cie Avant l’Aube

Rien ne saurait me manquer Compagnie Avant l’Aube image (c) Nicolas Pintea 1
© Nicolas Pintea

Nous avions découvert et adoré les créations de la Cie Avant l’Aube à Avignon Le Off. Nous avions ri à gorge déployée avec les girls de L’Âge libre, frémi avec les boys de Boys don’t cry. Ce n’est donc pas sans émotion que nous retrouvons la Cie Avant l’Aube dans sa nouvelle création et dans une nouvelle mise en scène de Maya Ernest.

Ce qui fait leur talent ? C’est une écriture déjà. Celle de Rien ne saurait me manquer est présentée comme collective et dirigée par Agathe Charnet que nous retrouvons également sur scène avec grand plaisir. Incisive, drôle, juste, l’écriture de Rien ne saurait me manquer tient ses promesses. À la fois simple et poétique, explorant les listes ou les dialogues, cette écriture qui caractérise si bien les créations de la Cie Avant l’Aube est belle de sincérité et d’émotion.

Ce qui explique encore leur réussite ? C’est une mise en scène audacieuse à laquelle Maya Ernest nous a habitué-e-s, et qui ne rate pas sa cible dans cette dernière création. Maniant humour et sérieux, burlesque et sensibilité, elle signe encore avec Rien ne saurait me manquer un beau succès. Costumes tout en noir figurant l’anonymat mais aussi ces spectres qui nous entourent et qui caractérisent les doutes auxquels les personnages qu’elles représentent sont en proie. Paillettes sur les visages, éternelles étincelles qui renvoient à un monde de faux-semblants. Collaboration avec le public qui vient créer une osmose de groupe dans la salle. De belles trouvailles en tout cas qu’il serait dommage de dévoiler dans leur totalité, mais qui, nous le savons, ne manqueront pas de vous surprendre.

Ce qui nous convainc d’un spectacle à l’autre ? C’est à chaque fois une équipe de comédiens au top du top. Rien ne saurait me manquer ne fait pas exception. Nous retrouvons sur scène Agathe Charnet et Lillah Vial qui brillaient dans L’Âge libre, et Vincent Calas, l’un des super boys de Boys don’t cry. Le trio qu’ils forment sur la scène est une belle réussite. Une maîtrise parfaite de leur art, une orchestration millimétrée et superbe, une dynamique de groupe qui vous insuffle une énergie splendide. Nos trois comédien-ne-s enchaînent les rôles sans fausse note et dans une limpidité déconcertante. On ne peut que saluer cette performance épatante.

Rien ne saurait me manquer : une nouvelle pièce qui explore les affres de la génération Y

Rien ne saurait me manquer Compagnie Avant l’Aube image (c) Nicolas Pintea 2
© Nicolas Pintea

Ils ont le talent ; ils ont aussi la jeunesse, une jeunesse qui vous fait presque blêmir du haut de vos 29 ans ! Surtout qu’ils en assument l’énergie, la fièvre créatrice, l’audace, la fraicheur. Ils assument également de faire de cette jeunesse le creuset de leurs créations, rendant à leur génération tant décriée, tant caricaturée, la noblesse des nuances et la richesse des convictions.

Nous avons exploré avec eux le nuancier perplexe des relations amoureuses, ou plutôt des diktats que la société impose en matière de relation amoureuse dans leurs deux dernières créations ; nous les suivons avec Rien ne saurait me manquer sur le fil fragile de la quête d’un sens à l’existence, quête qui se heurte à toutes les impasses dans lesquelles nous conduit le monde d’aujourd’hui.

Maya Ernest a choisi pour Rien ne saurait me manquer une forme fragmentée dont les sauts hardis vous font changer de saynète au même rythme que le zapping qu’on associe à la génération Y. Les références que le spectacle aborde sont celles d’une jeunesse qui s’est construite avec une pop-culture cinématographique : Marion Cotillard, Mélanie Laurent, Xavier Dolan, nous soufflent-ils ; nous y ajouterions Christophe Honoré, tant la thématique du trio amoureux fait penser aux Chansons d’amour dans la façon dont la pièce l’aborde.

Si l’humour est une nouvelle fois de mise comme dans L’Âge libre, le propos que tient Rien ne saurait me manquer ne manque pas de profondeur. La pièce traite ainsi brillamment de la paradoxale solitude d’une génération pourtant hyper-connectée ; elle déconstruit savamment les clichés d’une jeunesse irresponsable, ramenant la génération post-soixante-huitarde à ses échecs.

Rien ne saurait me manquer montre l’essentielle quête du bonheur, le détachement progressif du matérialisme, le rejet de l’idée de réussite sociale ou professionnelle. Rien ne saurait me manquer est une pièce juste et optimiste qui offre une belle exploration du monde d’aujourd’hui et de ses limites, et qui donne envie de croire à nouveau aux rêves qui nous hantaient à nos seize ans.

Vous l’aurez compris, coup de cœur de Bulles de Culture, Rien ne saurait me manquer est un spectacle à n’absolument pas manquer !

En savoir plus :

  • Rien ne saurait me manquer se joue au festival Avignon Le Off 2019, au Théâtre du Train Bleu, du 5 au 24 juillet à 19h20. Relâche les 11 et 18 juillet
  • Rien ne saurait me manquer a été joué au théâtre de La Reine Blanche du 20 février au 2 mars 2018, du mardi au samedi à 19h
  • Durée du spectacle : 1h
Morgane P.

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