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Heureux les Heureux de Jacques Connort avec Carole Bouquet affiche théâtre

[Critique] “Heureux les heureux” avec Carole Bouquet : Une vraie belle déception

Dernière mise à jour : janvier 28th, 2020 at 10:57 am

Carole Bouquet seule en scène sur une adaptation du roman de Yasmina Reza Heureux les heureux, cela donne un sacré fiasco théâtral. Bulles de Culture a assisté à la première du spectacle à Oyonnax et vous donne sa vision du spectacle. Notre avis et critique théâtre.

Synopsis :

Quatre personnages issus du roman de Yasmina Reza, Heureux les heureux : Robert puis Odile Toscano ; Raoul et Hélène Barnèche. Mari et femme alternent à deux reprises dans quatre monologues, tous interprétés par Carole Bouquet. Le fil directeur ? Montrer des couples dans une crise.

Heureux les heureux, une adaptation désagréablement simplificatrice

Dans son roman Heureux les heureux, Yasmina Reza met en place un imbroglio complexe de personnages dans une succession de monologues, jouant sur les échos entre les histoires. Si les portraits d’hommes et de femmes alternent, mari et femme sont toujours séparés par les portraits d’autres personnages et non présentés à la suite, du moins pour leur première apparition. L’ensemble gagne en puissance grâce aux nuances qu’apporte la multiplicité des personnages et leur mise en réseau.

Dans l’adaptation que propose Jacques Connort, l’œuvre de Yasmina Reza est considérablement réduite, et cela, dans tous les sens du terme : la myriade de personnages est représentée à travers quatre portraits, ce qui forme deux couples ; la vision qui en émane devient réductrice et caricaturale. Les quatre personnages, tous incarnés par Carole Bouquet, sont terriblement diminués sans les portraits échos qui leur donnent du relief dans le roman. Il en résulte quatre personnages fades, que l’interprétation de Carole Bouquet rend au mieux inintéressants, au pire agaçants.

En plus de cela, Heureux les heureux prend le public par la main comme s’il ne pouvait pas rétablir le sens tout seul. Ainsi, la citation de Jorge Luis Borges qui ouvre le roman est présentée sur une pancarte avant le début du spectacle ; elle éclaire le titre, mais le spectacle ne donne toutefois pas sens à cette réflexion inaugurale. De même, à l’entrée de chaque personnage, un panneau apparaît pour nous indiquer l’identité du personnage qui entre en scène, laissant ainsi à penser que le public est incapable de faire le lien entre le mari et la femme. Cela est d’autant plus inutile et lourd que les deux couples présentés dans le spectacle n’ont pas de rapport entre eux.

Un texte et une mise en scène non maîtrisés

Ce qui devait faire – on l’imagine – le succès du spectacle Heureux les heureux, c’est sa tête d’affiche : Carole Bouquet. Et sur ce point, la déception est largement à la hauteur des attentes que pouvait susciter la joie de voir sur scène la grande comédienne. Carole Bouquet s’est présentée sur la scène d’Oyonnax sans maîtriser du tout le texte du spectacle. Hésitations pénibles, erreurs manifestes, retours en arrière répétés donnent l’impression de voir jouer un-e collégien-ne qui aurait appris son texte la veille, « à l’arrache », et qui n’en comprendrait pas le sens ou la portée.

De ce fait, les quatre personnages d’Heureux les heureux ne prennent jamais vie sur scène ; Carole Bouquet les incarne avec le même ton traînant et hésitant, et dès la fin du premier tableau, le public lâche le fil du spectacle. Les monologues successifs perdent tout aspect truculent ou ironique. Le texte – et les personnages avec lui – perdent tout relief et deviennent insupportables. Soupirs d’agacement, ronflements manifestes, mouvements d’impatience emplissent progressivement la salle, et à juste titre.

C’est, en outre, que rien n’est maîtrisé sur scène : le décor, qui hésite entre symbolisme et réalisme, demande une manipulation lourde entre chaque tableau, et semble mettre encore plus en difficulté Carole Bouquet. Les costumes renforcent l’aspect caricatural des personnages. Les panneaux indicateurs de personnages s’insèrent mal dans le décor. Le panneau lumineux « Morbier » est à la fois agressif et sans la moindre utilité.

Quand Carole Bouquet revient sur scène après les applaudissements polis mais froids de la salle pour justifier l’échec du spectacle en précisant qu’il s’agissait de la première, elle achève d’agacer. Jouer sa première en province et loin des salles parisiennes justifie-t-il un tel manque de respect ? Carole Bouquet et Jacques Connort ont en tout cas confondu répétition et première : le mauvais spectacle qu’ils ont présenté au public d’Oyonnax n’a rien, mais alors absolument rien, d’un travail abouti.

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En savoir plus :

  • Heureux les heureux a été présenté au Centre Culturel Aragon d’Oyonnax le 2 octobre 2018
  • Tournée du spectacle en France : le 18 octobre 2018 au Théâtre Roger Barat d’Herblay ; le 30 octobre 2018 au Théâtre Jean Piat de Canet-en-Roussillon ; le 6 novembre 2018 au Théâtre Toursky de Marseille ; le 8 novembre 2018 au Théâtre Princesse Grace de Monaco ; le 24 novembre 2018 au Radiant-Bellevue de Lyon ; le 25 novembre 2018 au Théâtre des Cordeliers de Romans-sur-Isère ; le 27 novembre 2018 à l’Espace 2015 de Laruns ; le 28 novembre 2018 au Casino Barrière Biarritz
  • Tournée du spectacle en Belgique : le 3 novembre 2018 au Théâtre de Namur; le 9 décembre 2018 au Théâtre de Liège ; le 15 décembre 2018 au Centre Culturel d’Uccle à Bruxelles
  • Durée du spectacle : 1h15
  • Le roman Heureux les heureux de Yasmina Reza a remporté le Prix littéraire Le Monde en 2013
Morgane P.

4 Commentaires

  1. Même déception un mois plus tard au radian …..

  2. Le spectacle ne vaut pas le déplacement et en plus un coût élevé.

  3. Même constat hélas à Biarritz au Casino Barriere, je n’ai jamais vu autant de spectateurs quitter la salle pendant un spectacle
    Malaise de Mme Bouquet pendant le déroulement de la pièce…
    Et à la fin mécontentement général des spectateurs

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