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Les Choses Humaines Karine Tuil critique livre

Critique / “Les choses humaines” (2019) de Karine Tuil

Les choses humaines est le onzième roman de Karine Tuil. Le livre, véritable chronique judiciaire relatant un procès pour viol, a reçu le Prix Goncourt des lycéens et le Prix Interallié en 2019. La critique et l’avis livre de Bulles de Culture. 

Synopsis :

Les Farel forment un couple de pouvoir. Jean est un célèbre journaliste politique français ; son épouse Claire est connue pour ses engagements féministes. Ensemble, ils ont un fils, Alexandre, étudiant dans une prestigieuse université américaine. Tout semble leur réussir. Mais une accusation de viol va faire vaciller cette parfaite construction sociale. 

Les choses humaines : un récit captivant

Un conseil en commençant la lecture de ce roman coup de poing : ne vous laissez pas avoir par la première moitié du livre, romance classique et jeu de tromperie au sein d’une classe aisée. Cette exposition, certes un peu longue mais très utile pour présenter le contexte social, aboutit dans un second temps à un récit captivant, dont il sera impossible de décrocher. 

Karine Tuil, une fervente défenderesse de la condition des femmes ? On n’en doute pas au regard de ce nouveau récit qui débute en décrivant l’un de ses personnages principaux comme étant l’une des stagiaires de la Maison Blanche en même temps que Monica Lewinsky. Avec Les choses humaines, l’autrice est au fait des combats féministes en citant #MeToo, #BalanceTonPorc ou en ressortant les infamies misogynes de Trump, “l’attrapeur de chattes”. 

Une pensée réfléchie sur la violence entre les deux sexes

Pourtant, Les choses humaines n’est pas un pamphlet revendicatif sur la parole libérée. Le livre est tout au contraire une pensée réfléchie sur la place de chacun dans cette perception de la violence entre les deux sexes. Alors que Claire Farel est une figure militante connue, ses certitudes sont remises en cause lorsque c’est son jeune fils, Alexandre, qui est accusé de viol envers une jeune fille de classe moyenne, Mila Wisman. 

Au cours d’un procès qu’elle détaille avec minutie, l’autrice se veut la porte parole des deux camps. Quand la partie civile fait valoir le traumatisme d’une vie du fait de cette agression violente dans un sordide local, la défense avance sur l’erreur de perception du présumé violeur. En cela, Les choses humaines va décortiquer avec grande intelligence cette notion de consentement en nous montrant les difficultés qu’il peut exister pour le caractériser. Alors que pour Mila, son silence vaut preuve irréfutable d’une contrainte, c’est tout l’inverse pour Alexandre qui a présumé l’acceptation de la jeune femme.  

Karine Tuil dépeint une chronique judiciaire avec notamment des détails procéduraux qui font écho à son passé de juriste. L’affaire est d’une précision absolue, abordant aussi bien la mécanique d’un contrôle judiciaire que le choix des jurés aux assises ou la différence entre crime sexuel et agression sexuelle. Les plaidoiries de chacun des avocats sont un moment de rhétorique extraordinaire dans le livre, ponctué d’un cours de droit passionnant, notamment sur la définition du viol selon la Cour de cassation.

En savoir plus :

  • Les choses humaines, Karine Tuil, 28 août 2019, éditions Gallimard, collection Blanche, 352 pages, à partir de 14.99 €
Antoine Corte

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