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[CRITIQUE] “London House” (2017) de David Farr

Un an après sa sortie en Angleterre, London House (The Ones Below en anglais) arrive sur nos écrans. Présenté dans la section Panorama de la 66ème Berlinale, le premier long-métrage du scénariste David Farr (The Night Manager, plusieurs épisodes de MI-5) met en vedette notre Clémence Poésy nationale dans un anglais impeccable. L’avis de Bulles de Culture sur ce thriller intimiste.

Synopsis :

Dans un quartier résidentiel de Londres, Kate (Clemence Poésy) et Justin (Stephen Campbell Moore), trentenaires bientôt parents, occupent un grand appartement au premier étage d’une belle maison bourgeoise. Lorsque Theresa (Laura Birn) et Jon (David Morrissey), un couple aisé également dans l’attente d’un enfant, emménagent dans l’appartement du rez-de-chaussée, les deux couples se lient d’amitié. Kate est fascinée par Theresa mais au fil d’événements troublants, elle est envahie par un sentiment d’inquiétude qui va se transformer en un véritable cauchemar.

London House :
Un thriller… divertissant

 

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© Septième Factory

 

En réalité, on ne s’ennuie pas devant London House. L’intrigue tient plutôt en haleine, et le personnage de Theresa (par la convaincante Laura Birn), est tout de même énigmatique. Sans grande originalité, les rebondissements fonctionnent plutôt et savent réjouir le spectateur.

London House est ce qu’on pourrait appeler un thriller du dimanche, qu’il faut voir si on a une envie de divertissement simple, OU une carte de cinéma illimité, OU un gros crush sur Clémence Poésy (qui fait le minimum syndical comme d’habitude), OU…

Inquiéter avec une ambiance
de magazine déco

 

… si on adore Marie Claire Maison. Là ce sera notre film de l’année.

Car l’opposition entre les deux couples de la London House est surtout figurée par… le look de leurs appartements. Looks qui ne relèvent, c’est là que le bât blesse, que de clichés de magazines déco :

  • Au premier étage, Kate et Justin ont opté pour un look bois, plantes et alternance de meubles design et chinés. Apaisant, il illustre bien leur mode de vie lisse et un brin bohème.
  • Au rez-de-jardin, Theresa et Jon ont choisi un style années 60 aux couleurs soutenues et dominées par le jaune. Le jardin carré à grande pelouse et arbuste boule est assurément la pièce maitresse du lieu. Dehors comme dedans, un rangement impeccable souligne les nombreuses formes géométriques.

Avec ces choix criards et ce goût de la précision, Theresa et Jon pourraient bien être des psychopathes. D’autant plus qu’ils disent pas mal de choses bizarres. Kate et Justin, proches de la nature et favorisant les tons pastel, pourraient regretter de les avoir gentiment invités à diner.

Laura Birn : une découverte

 

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© Septième Factory

 

S’il n’y avait qu’une chose à retenir de London House une fois le divertissement consommé, ce serait l’actrice Laura Birn qui interprète le personnage de Theresa.

Theresa perd un enfant après sept ans à essayer de tomber enceinte, par la faute de Kate, enceinte elle aussi et qui n’a longtemps pas voulu d’enfant. Avant le drame, Theresa se livre de façon presque gênante sur son intimité. Après, elle s’introduit par effraction dans l’intimité de Kate, en gardant l’apparente bienveillance du voisinage bourgeois. Au point de faire douter de la santé mentale de Kate elle-même.

Avec cette matière, l’actrice d’origine finlandaise Laura Birn crée un personnage à la fois caricatural et touchant. Blonde platine lookée comme une mère bourgeoise irascible, son regard doux transpire pourtant la sensibilité. Paradoxe qui attise la curiosité du spectateur et rend le personnage bien plus attachant qu’une Kate lisse et froide.

Les trop grands défis du thriller domestique…

 

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© Septième Factory

 

London House et son bébé mort eurent probablement été époustouflants si le film avait été réalisé par un Lars Von Trier ou un Stanley Kubrick — un spoil et un lieu commun dans la même phrase : ne me remerciez pas, c’est gratuit.

Pour tourner le lisse en malsain et muer les petits enjeux domestiques en thrillers magistraux, il faut faire appel aux génies. On pense bien-sûr au scotchant Antichrist de Lars Von Trier dans lequel la mort d’un enfant mène une femme au rejet morbide de sa sexualité. Pour Stanley Kubrick, on pense notamment à Lolita, peau de pêche et fausse naïveté, qui fait semblant de ne pas jouer avec une relation pédophile.

Le défi cinématographique était-il trop grand ? Et si, piste rarement explorée, London House avait cédé à tort aux sirènes du grand écran ?

… enfantent un téléfilm refoulé

 

On en parle trop peu, du drame des téléfilms refoulés. Quand, comme London House, on est un petit thriller lisse et plutôt divertissant, avec juste ce qu’il faut de rebondissements plutôt déjà vus pour tenir un couple devant sa télévision un dimanche soir, pourquoi, mais POURQUOI, troquer ses 2 à 5 millions de téléspectateurs potentiels contre 29 000 $ au box office anglais, 8 000 $ en Finlande et 5000 $… aux Émirats arabes unis?

L’échelle purement domestique de l’histoire cantonne déjà London House à un sujet plutôt étroit. Même pas de fait divers atroce, juste un accident et une femme jalouse d’une autre. Pour faire du cinéma dans un univers aussi anecdotique, il fallait mettre des tripes de grande ampleur sur la table. Du gore ou du glauque, mais du véritablement dérangeant. Ou sortir du placard et se revendiquer téléfilm.

 

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En savoir plus:

  • Date de sortie France : 22/03/2017
  • Distribution France : Septième Factory
Zoé Klein

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