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♥ Critique / “Spotlight” (2015) : au cœur d’un complot

Dernière mise à jour : avril 25th, 2021 at 12:21 pm

Spotlight de Tom McCarthy nous plonge dans les méandres d’un effroyable complot, autant véridique qu’inadmissible. Pour mener l’enquête, un casting de marque, avec en tête Michael Keaton, Mark Ruffalo, Rachel McAdams et Liev Schrieber. Un hommage efficace à l’un des derniers fleurons du journalisme d’investigation d’une époque révolue. L’avis et la critique film de Bulles de Culture sur ce long métrage coup de cœur de Bulles de Culture.

Synopsis :

Été 2001. À peine nommé rédacteur en chef du Boston Globe, Marty Baron (Liev Schreiber) missionne les journalistes d’investigation de l’équipe Spotlight, dirigée par Walter “Robby” Robinson (Michael Keaton), pour enquêter sur un curé accusé de pédophilie. L’affaire est grave puisque le prêtre aurait violé des dizaines de jeunes paroissiens en l’espace de trente ans…

Spotlight : dans les règles du genre

Spotlight est un pur film de journalisme d’investigation, dans la lignée directe du cultissime Les hommes du Président d’Alan J. Pakula. Tout comme son prédécesseur, Spotlight reconstitue avec fidélité une enquête journalistique bien réelle mettant à jour un complot d’une ampleur effroyable.

Pour y parvenir, le film respecte les codes du genre et privilégie l’authenticité. L’image du chef opérateur Masanobu Takayanagi — qui s’est prêté au même style d’exercice sur le film True Story (2015) Rupert Goold — favorise une simplicité esthétique naturaliste. Une sobriété qui va de pair avec la mise en scène discrète de Tom McCarthy et qui apporte en plus une fluidité esthétique dans son découpage et ses mouvements de caméra invisible, le tout au service de la narration. Un effort bien nécessaire du fait de la complexité de l’intrigue et des nombreuses pistes qu’elle explore.

Il en va de même pour la musique de Spotlight, composé par l’incontournable Howard Shore. Omniprésente tout au long du film, la partition du célèbre compositeur est éminemment cinématographique, tout en restant subtile et discrète. La musique renforce ainsi la fluidité de la narration et apporte avec élégance une cohésion supplémentaire au récit.

L’imposant casting hollywoodien apporte enfin la dernière touche d’authenticité au film, avec Michael Keaton et Mark Ruffalo en tête. Les deux acteurs ont en effet collaboré étroitement avec les deux journalistes qu’ils interprètent dans le film, Walter Robinson et Michael Rezendes — qui seront d’ailleurs les premiers bluffés par la prestation des acteurs, troublante de réalisme.

Tous ses efforts mis en œuvre au service des différents aspects du film servent au final un seul but bien précis : rapporter avec véracité et clarté le développement effarant d’une enquête historique sans précédent.

Une enquête fascinante

Lorsque l’équipe de Spotlight débute son enquête, un seul prêtre pédophile est concerné. Et ce qui interpelle les journalistes du Boston Globe, c’est le fait que le prêtre en question ait pu récidiver impunément en changeant de paroisse au fil des ans. Mais à mesure que l’enquête avance, l’affaire va rapidement prendre des proportions hallucinantes pour finir par mettre à jour pas moins de 87 prêtres pédophiles rien que dans la région de Boston.

L’étonnante enquête des quatre journalistes enquêteurs révèle ainsi l’incroyable développement tentaculaire d’un complot systémique sidérant. Boston est l’une des villes flambeaux du catholicisme, une institution puissante et totalement implanter dans l’ensemble de la ville et plus largement dans l’ensemble des États-Unis — comme le révèle le générique final du film Spotlight listant les nombreuses villes américaines concernées par ce même scandale.

Les méandres de cette affaire scandaleuse s’étendent donc à travers toutes les différentes sphères de la société de Boston, du système judiciaire au système éducatif. Et c’est aux journalistes de Spotlight de suivre ce jeu de pistes complexe pour dénouer l’effroyable vérité de l’affaire, résumée en ces mots par l’éditeur en chef du Boston Globe : “If it takes a village to raise a child, it takes a village to abuse one” (“S’il faut un village pour élever un enfant, il faut un village pour en maltraiter un”).

L’implacable exposition de la vérité

L’accaparante complexité de l’affaire s’impose naturellement comme le sujet principal du film Spotlight et éclipse toutes autres pistes narratives possibles : la vie privée des protagonistes, leur parcours émotionnel,  le doute conspirationniste, la crise du journalisme face à Internet et les nouvelles technologies 2.0, ou bien même l’impact historique et médiatique du 11 septembre… Tant de thèmes pertinents et parallèles au récit qui ne sont qu’effleurés par le scénario, entièrement focalisé sur l’enquête.

On pourrait regretter ce manque de profondeur, mais Tom McCarthy et son coscénariste Josh Singer (À la maison blanche, Le cinquième pouvoir) sont bien conscients des limites du format long-métrage. En gardant l’investigation journalistique comme fil narratif exclusif de Spotlight, ils permettent le récit limpide de cette enquête obsédante et tentaculaire.

Les cinéastes offrent ainsi au spectateur une compréhension plus juste et précise des tenants et aboutissants d’un complot effroyable, à l’échelle d’une société toute entière — et pas seulement à l’échelle américaine puisque de nombreuses villes en France et dans le monde sont citées à la fin du film.

Spotlight s’évertue donc à coller à la réalité de l’enquête et des faits avec une sobre éloquence cinématographique. Une efficacité mise au service de la narration qui submerge le spectateur dans les différentes sphères sociales de Boston, mais sans jamais se perdre dans l’enquête qui avance avec limpidité du début à la fin.

Et même si de nombreux enjeux sont effleurés à travers le film — qu’ils soient moraux, sociaux, émotionnels, ou même spirituels —, une seule chose compte au final : l’implacable exposition de la vérité.

Spotlight est un film coup de cœur de Bulles de Culture.

En savoir plus :

Emilio M.

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