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Kepler(s) saison 1 image série policière
© Jean Philippe Baltel / EVS / FTV

Critique & Interviews / “Kepler(s)” saison 1 avec Marc Lavoine et Sofia Essaïdi

Dernière mise à jour : août 13th, 2020 at 02:28 pm

Lancement réussi pour la série policière Kepler(s) — créée par Yoann Legave et Jean-Yves Arnaud, réalisée par Frédéric Schoendoerffer — avec plus de 4,6 millions de téléspectateurs lors de la diffusion de ses deux premiers épisodes sur France 2. La critique et l’avis série de Bulles de Culture sur Kepler(s) saison 1 avec Marc Lavoine et Sofia Essaïdi, diffusé depuis le lundi 4 mars 2019, ainsi que notre rencontre avec l’équipe.

Synopsis :

Suite à une opération de police qui a mal tourné, Samuel Kepler (Marc Lavoine), un flic à la santé mentale chancelante, est mis au vert au commissariat de Calais où il tente de se reconstruire avec sa femme Anne (Élodie Navarre) et leur fille Marion (Yasmine Lavoine). Affecté à un simple travail de bureau, Kepler pense tenir ses démons à distance. Mais une disparition bouleverse tout : celle de la fille du patron d’Anne, Lucie Martel. Kepler fait équipe avec Alice Haddad (Sofia Essaïdi), une jeune flic locale, pour mener l’enquête.
Énergique et dotée d’un caractère trempé, Alice connaît Calais comme sa poche. Kepler, sous traitement, garde le contrôle malgré quelques alertes. Le corps de Lucie Martel est finalement retrouvé sur l’ancien terrain de la jungle de Calais.

Kepler(s) saison 1 : une série inspirée d’un célèbre cas complexe de trouble dissociatif de l’identité

J’ai joué trois flics dont une série internationale [NDLR : Crossing Lines] mais Kepler est quand même le flic que je préfère parce qu’au-delà du flic, c’est un type qui a des emmerdes ; il a une vie, une bagnole, il se pose des questions, il n’est pas sûr de lui, il est à la fois fort et vulnérable. C’est un personnage très trouble. Il est ce qu’il peut mais j’aime beaucoup ses principes et ses valeurs.
Marc Lavoine

Quelle est la genèse de la série Kepler(s) ?

La même que celle de Split (2016) de M. Night Shyamalan : le cas médical réel de Billy Milligan.

“La principale influence est le livre de Daniel Keyes sur Billy Milligan, qui s’appelle Les mille et une vies de Billy Milligan, nous a ainsi expliqué le co-créateur Yoann Legave. Ce cas médical se lit comme un excellent roman policier. C’est assez surréaliste ce qu’il s’y passe et c’est passionnant. Le dispositif du ‘projecteur’ que nous utilisons dans la série y est déjà évoquée par le malade pour expliquer la manière dont ses personnalités s’emparent de son corps”.

Et le second créateur de la série, Jean-Yves Arnaud, de préciser : “Billy Milligan y explique qu’il est dans une grande salle noire avec tous ses passagers et une grande lumière, qu’il appelle le ‘projecteur’, et c’est le passager qui est sous le projecteur qui a les commandes”.

Certes, si la mise en image de cette idée ne nous a pas pleinement convaincu, mais force est de reconnaître que cette dissociation de personnalités contre laquelle lutte le personnage principal, interprété par Marc Lavoine, au point de le faire douter de lui-même, fait partie du plaisir addictif de la série Kepler(s).

“Billy Milligan a 22 personnalités donc il a fallu faire des choix, a ajouté Jean-Yves Arnaud. Il y a Kepler, un enfant, Simon (Sacha Pirlet), Rajka la brute (Laurent Fernandez) et Arthur (Rémi Bichet) qui est une sorte de manipulateur. Il y a quatre personnalités à jouer et on a choisi des personnalités qui portent des archétypes, c’est-à-dire qui représentent des aspects de désir qu’on ne s’autorise pas personnellement à vivre totalement. Par exemple, on aimerait tous à un moment donné être Rajka et défoncer une voiture ou être l’enfant qui prend nos peurs”

“On est très fan du polar social”

On est très fan du polar social comme Henning Mankell ou Michael Connelly, c’est-à-dire des auteurs qui utilisent le polar pour raconter leur société. Ce qu’on ne fait pas toujours en France et qu’on a essayé de faire ici.
— Jean-Yves Arnaud

Pourquoi la ville de Calais ?

En effet, l’autre originalité de la série Kepler(s) est d’aborder la problématique sociétale des migrants à Calais. Pourquoi un tel arrière-plan ?

“Calais parce que c’est une situation humaine tragique, nous a répondu le co-scénariste Yoann Legave, et un contexte politique très fort qui, à l’époque où on a commencé à écrire la série, était très très peu traitée dans le presse avant la destruction de la ‘Jungle’ en 2014. Et cela nous intéressait de questionner la réalité de ces gens et de leurs parcours à travers cette notion d’identité qui concerne le personnage principal”.

Jean-Yves Arnaud, venant de l’ONG, et Yoann Legave de la presse, il y a d’ailleurs un vrai réalisme dans le traitement de ce sujet à travers les migrants eux-mêmes, les associations qui les aident et les passeurs qui les exploitent.

Ce que nous a confirmé Yoann Legav : “On s’est beaucoup inspiré de la réalité, de policiers locaux et de témoignages de réfugiés”. Et Jean-Yves Arnaud d’ajouter : “Cette situation humaine, politique et sociale incroyable, on avait envie de s’en emparerMais on n’avait pas envie de le faire de façon frontale, sinon il fallait faire du documentaire. Comme on aime le polar, on a cherché à lier les deux pour être dans un divertissement qui pose un regard là-dessus”.

Alors certes, Kepler(s) rejoint la très longue liste des fictions policières, qui pullulent à la télévision, mais il faut reconnaître que ce projet de fin d’études du Ceea (Conservatoire européen d’écriture audiovisuelle) de Jean-Yves Arnaud et Yoann Legave s’avère particulièrement intéressant et singulier par son approche intéressante et humaine d’une problématique sociétale à travers la fiction.

“L’histoire d’un homme vulnérable”

Evidemment, Kepler(s) se passe à Calais avec la problématique des migrants, mais la série est surtout l’histoire d’un homme vulnérable qui a des tas de problèmes. Et il y a quelque chose qui nous parle à tous dans ce personnage.
— Frédéric Schoendoerffer

Kepler, c’est Marc Lavoine. Un flic parisien muté à Calais après une affaire qui a mal tourné et qui souhaite retrouver la routine de la vie de bureau sur les conseils de son ami psychiatre Antoine Metzger (Stéphan Guerin-Tillié). Le problème est que très vite, une nouvelle affaire criminelle va l’obliger à retourner sur le terrain et à se confronter à nouveau à “ses passagers. Parviendra-t-il à les contrôler ? Mais a-t-il d’ailleurs intérêt à le faire ?

“Ce qui nous intéressait dans le cas médical de dissociation de la personnalité, nous a dit le co-créateur Jean-Yves Arnaud, c’est comment ces personnalités différentes donnent à la fois de la liberté et de la contrainte. Et dans le cas de cette dernière, quand on a eu envie de parler de Calais, avec des personnes qui ont envie de passer et qu’on contraint à un endroit, on s’est dit qu’il y avait un écho intéressant là-dedans”.

Lors de son enquête sur une série de crimes liés au passé, Kepler va pouvoir s’appuyer sur une jeune flic sans expérience mais qui va réussir à se rendre indispensable à ses côtés grâce à sa connaissance du terrain et de la problématique des réfugiés. Interprétée par Sofia Essaïdi, ce personnage féminin est à l’image de ceux d’aujourd’hui, à la fois fort et fragile, voire blessé dans le conflit qui l’oppose à sa mère (Isabelle Renauld) autour de la question des migrants. Mentionnons également au casting de Kepler(s) la présence d’Élodie Navarre, Serge Riaboukine et Cyril Lecomte.

Une saison 2 ?

Bref, avec un tournage du côté de la région Hauts-de-France (Calais, Dunkerque et alentours), un scénario écrit par Jean-Yves Arnaud et Yoann Legave, une réalisation de Frédéric Schoendoerffer, une musique de Thibault Quillet, la série policière Kepler(s) captive jusqu’au bout par ses personnages et son histoire, malgré quelques défauts. Mention spéciale à la comédienne Sofia Essaïdi qui y est épatante.

Y aura-t-il un Kepler(s) saison 2 ?

Tout dépendra des résultats des audiences. Mais côté auteurs, “on ne s’interdit pas une nouvelle saison, nous a ainsi confié Jean-Yves Arnaud, mais ce serait une toute nouvelle histoire à raconter avec les mêmes personnages, une sorte d’anthologie”. Et Yoann Legave d’ajouter pour conclure : “Ce qui nous intéresserait, ce serait de creuser encore plus le trouble psychologique du personnage”.

En savoir plus  :

  • Kepler(s) saison 1 a été diffusé sur France 2 depuis le lundi 4 mars 2019 à 21h
Jean-Christophe Nurbel

2 Commentaires

  1. Je tombe là-dessus ce soir, en consultant mon « Guide des programmes » de box SFR, incité à y jeter un oeil par les 3 lignes de commentaire critique qui soulignent l’excellent jeu de Marc Lavoine. (« Ah bon ? Avec le temps, tout arrive, allons voir ! » ;>).

    Au bout de l’épisode, je suis déjà accro et veut en savoir plus, direction IMdB… et votre article, Jean-Christophe, est le seul répertorié chez eux (et reflète parfaitement mon sentiment) ! 🙂

    Alors oui, thématiquement et dans les grandes lignes, ça rappelle 36 séries US et quelques françaises, mais ça a une tonalité et un charme propre et ça réussit très bien à captiver. Marc Lavoine y est tout à fait pour qqch, et sa partenaire, Sofia Laïdi, est épatante aussi.

    Mais c’est le traitement choisi par les auteurs et axé sur l’humain (le problème psychologique assez grave de Kepler, la façon très humaine dont Alice conçoit son métier de flic) et le social (le problème des migrants à Calais), qui font la singularité et la qualité de « Kepler(s) ».

    Toutes proportions gardées, c’est un mélange réussi de série policière classique et de « The Wire » (série n°1 de tous les temps dans mon palmarès perso !).

    Et je me suis mis un rappel sur mon phone pour être sûr de ne pas louper la suite lundi prochain. 🙂

    Lionel

  2. Je suis très déçu de l’exposition des problèmes psychologiques du protagoniste. C’est tout à fait nul. Le thème de la dissociation n’est pas du tout développé. Cela dit, Lavoine a le physique de l’emploi, mais c’est surtout Sofia Laïdi qui se distinguee par son jeu nuancé et convaincant.

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