Sur Bulles de Culture, art, cinéma, littérature, musique, spectacles, télévision... chaque jour, la culture sort de sa bulle.
Quand sort la recluse image Fred Vargas image couverture

Critique / “Quand sort la recluse” (2017) : un polar arachnophile de Fred Vargas

Dernière mise à jour : décembre 7th, 2020 at 11:34 am

Avec le roman Quand sort la recluse, Frédérique Audoin-Rouzeau, de son nom de plume Fred Vargas, livre une série de meurtres dont la résolution est digne d’un Agatha Christie. Le titre à lui seul est à la fois évocateur et mystérieux. « La recluse », qu’est-ce donc que cette bête là ? Une araignée… Vraiment ? L’avis et la critique livre de Bulles de Culture.

Synopsis :

A Nîmes, des octogénaires succombent des piqûres d’une araignée nommée la recluse, jusque là disparue des contrées françaises. Des vieillards qui meurent…ça n’intéresse personne. Personne ? Suivant son instinct légendaire, le commissaire Adamsberg décide de mener une enquête officieuse pour meurtre.

Quand sort la recluse : une sombre histoire de vengeance

– Qu’est-ce que vous avez, commissaire, avec cette recluse ?
– Et vous, Voisenet ?
– Moi, je vous l’ai dit. Mais vous ?
– Si je le savais, lieutenant.

Quand sort la recluse est le 9ème roman mettant en scène le vaporeux commissaire Adamsberg tout juste revenu des brumes islandaises. Brumes dont émergera, au terme d’une nouvelle enquête aussi bien tissée qu’une toile d’araignée, une résolution surprenante. Mais patience, Fred Vargas sait ménager ses effets et créer de la frustration chez son lecteur, prenant son temps pour installer l’intrigue principale, jouant avec efficacité sur les ellipses.

Au final, on est captivé du début à la fin, pris dans les mailles du filet tissé par la romancière. Efficace, déroutante, surprenante.

Des personnages jouissifs

Assassinés, répéta Danglard. Par des recluses ?

Dans Quand sort la recluse, on continue à découvrir — et à s’attacher — à l’équipe du commissaire Jean-Baptiste Adamsberg, le commissaire minéral. Une galerie de personnages secondaires toujours aussi jouissifs et farfelus : Danglard, l’érudit hypermnésique et alcoolique, Retancourt la déesse-roc du commissaire, Estalère le naïf et ses yeux écarquillés sur le monde, Froissy la hackeuse boulimique, Voisenet et sa passion pour l’ichtyologie (l’étude des poissons)…

Chacun à sa manière et avec ses petites manies donne lieu à des situations cocasses. Une grande absente néanmoins de ce roman est Camille, l’amour impossible d’Adamsberg.

Le style Fred Vargas

On aime Fred Vargas pour sa plume, son style. Et quel style ! Finalement, l’histoire importe presque moins que le plaisir de lire les descriptions des lieux, d’entrer dans la tête des personnages ou de s’imaginer au beau milieu de leurs discussions tant les dialogues sont vivants. Les mots, toujours les mots, leur choix, leur sonorité ; leur double sens aussi qui nous mettent sur de fausses pistes.

Le vieux Lucio, et son précepte de ne jamais laisser une piqûre en plan, toujours la gratter jusqu’au bout, jusqu’au sang, sauf à risquer d’être démangé toute sa vie.

De l’âne au coq

– Il y en a eu une autre, commissaire, chuchota-t-il, comme s’il existait un dangereux secret entre eux deux.
– Quoi ? demanda Adamsberg, négligent, en lançant sa veste sur une chaise.
– Une victime de la recluse.

Des fausses pistes, Fred Vargas en a saupoudré dans ce neuvième roman avec de truculentes histoires d’animaux : la brebis qui fait disparaître le téléphone du commissaire, le blaps « le scarabée funèbre », un couple d’oiseaux, un pigeon ramier, une murène de l’Atlantique à robe marbrée et l’araignée tueuse, la recluse violoniste. Indéniablement, l’auteure puise dans son savoir d’archéozoologue et médiéviste française.

Quand sort la recluse est aussi un roman sur les femmes et le traitement qu’on leur réserve mais chuuut ! je ne veux pas trop en dévoiler si ce n’est que ce nouvel opus de la saga Adamsberg est plus sombre, pour ne pas dire plus glauque, que les précédents. Celui-ci pourrait bien réserver quelques angoisses nocturnes, voire réveiller l’araignée au plafond chez certains lecteurs.

Et pour conclure, voici une sélections de romans à lire absolument si vous aimez le style de Fred Vargas (classé dans mon ordre de préférence) :

  • L’Homme aux cercles bleus (1991) – Prix du festival de Saint-Nazaire 1992
  • L’Armée furieuse (2011)
  • L’Homme à l’envers (1999) – Grand prix du roman noir de Cognac 2000, Prix Mystère de la critique 2000
  • Temps glaciaires (2015) – Prix Landerneau polar 2015
  • Un lieu incertain (2008)
  • Sous les vents de Neptune (2004)
  • Dans les bois éternels (2006)
  • Pars vite et reviens tard (2001) – Prix des libraires 2002, Grand Prix des lectrices de ELLE 2002, Deutscher Krimipreis

En savoir plus :

Marjolaine Gaudard

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.