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L'Ile des esclaves affiche
© D.R.

[Critique] “L’Île des esclaves” par la Cie Les Affamés

Dernière mise à jour : novembre 14th, 2019 at 11:07 pm

La Cie Les Affamés avait pris possession du Théâtre des Corps Saints au Festival Off d’Avignon, pour présenter leur création 2016,  L’Île des esclaves de Marivaux. Une adaptation saisissante en forme de coup de poing. L’avis et la critique théâtre de Bulles de Cuilture.

Synopsis :

Iphicrate (Anthony Candellier), le maître capricieux d’Arlequin (François Tantot), ainsi qu’une dame du monde, Euphrosine (Marie-Véronique Pouges), accompagnée de sa servante Cléanthis (Aude Carpintieri), échouent tous les quatre sur une île gouvernée par des esclaves. Sous les auspices d’un des habitants de l’île, Trivelin (Gilles Droulez)les rôles s’inversent et les deux esclaves prennent la place des maîtres…

L’Île des esclaves : finesse du jeu et de la mise en scène

L'Ile des esclaves image
© D.R.

C’est une belle Île des esclaves que la Cie Les Affamés donne à voir aux spectateurs curieux de découvrir ou redécouvrir ce classique du théâtre français. L’intrigue, hautement cocasse, a permis aux cinq comédiens de déployer tout leur talent.

Deux esclaves deviennent maîtres de leurs oppresseurs, invités en cela par un dernier larron, habitant de cette île insolite ; un canevas qui appelle des scènes comiques, un chassé-croisé tordant, d’anciens maîtres désemparés et de nouveaux triomphants. Mais cela appartient au texte éclatant de Marivaux que fait vivre avec réussite cinq comédiens.

Gilles Droulez, dans le rôle de Trivelin, est impressionnant. Justesse du ton, précision dans les gestes, il campe un bienfaiteur ambigu, tant féroce qu’affable.

Anthony Candellier et Marie-Véronique Pouges interprètent les maîtres déchus avec conviction. La comédienne brille dans le personnage de la coquette, peu amène et méprisant ses nouveaux tortionnaires. Le comédien est tout aussi bon dans l’expression de sa condition passée.

Les anciens esclaves, Aude Carpintieri et François Tantot incarnent avec conviction leurs personnages dans leur nouvelle posture sociale. Cléanthis (Aude Carpintieri) se régale malicieusement des menues vengeances qu’elle inflige à Euphrosine (François Tantot qui s’illustre dans un rôle d’Arlequin très fantasque et très expressif).

Gilles Droulez à la mise en scène et Marie Landgraf à la scénographie ont fait un travail remarquable. La palissade en bois, qui sépare Trivelin du reste des protagonistes, occupe l’espace scénique et devient un élément central de la mise en scène. Depuis le haut de la palissade ou à travers une ouverture créée dans cette dernière, Trivelin est à la fois “l’auteur” du jeu auquel se livrent les quatre compagnons, mais aussi le spectateur. Un spectateur peut-être, finalement, impuissant…

Dissidence

A plusieurs titres, L’Île des esclaves par la Cie Les Affamés est une pièce dissidente. Une dissidence comme il faut en voir au théâtre, que l’on aime ou que l’on déteste, mais qui ne laisse pas indifférent : ce qui signifie que le pari est tenu.

Si Marivaux interroge dans son texte l’effectivité d’une condition sociale, la lecture de la Cie Les Affamés va plus loin. La mise en scène propose véritablement de réfléchir aux thèmes du lien social, de l’oppression et de la vacuité du pouvoir… et fait preuve d’une très grande originalité.

Un petit côté “lutte des classes” peut-être, auquel on adhère ou non, mais qui a le mérite de donner un coup de fouet.

Vu et approuvé !

En savoir plus  :

  • L’Île des esclaves par la Cie Les Affamés du 7 au 30 juillet 2016 au Théâtre des Corps Saints (Avignon, France)
Agathe M.

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