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Making a murderer affiche

Making a Murderer (2015), quand la réalité dépasse la fiction

Dernière mise à jour : mars 25th, 2019 at 02:48 pm

Making a murderer afficheMaking a Murderer de Laura Ricciardi et Moira Demos est la toute nouvelle série à succès de Netflix qui fait couler beaucoup d’encre sur la toile. Une série noire aussi passionnante que True Detective ou Fargo. Une enquête incroyable en dix épisodes plus captivants les uns que les autres, avec des cliffhanger dignes des meilleurs scénarios qu’Hollywood ait jamais offert. Et dernier petit détail : c’est une série documentaire !    

Synopsis :

Filmé sur 10 ans, ce documentaire suit l’histoire de Steven Avery, citoyen américain qui a passé 18 ans en prison pour agression sexuelle (avant d’être innocenté par un test ADN), puis a été suspecté d’avoir commis le meurtre de Teresa Halbach deux ans après sa sortie de prison.

Bienvenue à Manitowoc County, WN

 

making a murderer image
© Netflix

Making a Murderer se déroule dans le petit County de Manitowoc dans l’État du Wisconsin, dans le nord des États-Unis à l’ouest des grands lacs. Un petit coin d’Amérique un peu paumé, où les hivers sont longs et froids, et la population locale… pas très développée.

Le genre d’endroit où les faits divers sordides foisonnent, dans le style de Fargo — la fameuse petite ville du Dakota du nord n’est d’ailleurs pas très éloignée de Manitowoc —.

Les protagonistes de l’affaire, Steven Avery et sa famille, sont des représentants parfaits de la “White trash America”, la population blanche et pauvre des États-Unis. Gérants d’une casse lugubre et isolée, les Avery vivent en famille, dans de piteux “trailers” (mobile-home américains), coupés du reste de la communauté locale. Aussi peu éduqués que cultivés, les Avery ont une sale réputation à Manitowoc et représentent le plus bas de l’échelle sociale du County.

C’est dans ce contexte que Moira Demos et Laura Ricciardi (ancienne avocate) débutent leur documentaire en 2005 pour y suivre Steven Avery à sa sortie de prison, après 18 ans de détention pour un crime qu’il n’avait pas commis. L’idée est de faire un bilan sur cette injustice et de comprendre l’impact sur les vies de Steven Avery et des siens. Mais c’est aussi dans le but de suivre les répercussions de l’affaire au sein du système judiciaire local, vraisemblablement responsables de cette impardonnable erreur.

Steven porte plainte, un gigantesque procès se dessine, 35 millions de dollars de dommages et intérêts, des têtes vont tomber et des carrières se briser. Justice va être faite… ou pas.

Car Steven Avery se fait à nouveau inculpé, pour meurtre cette fois. Une nouvelle affaire commence sous les yeux des documentaristes atterrées.

Un documentaire 3.0

 

 

Making a Murderer suit le périple des Avery sur dix années, de 2005 à sa diffusion en 2015. Plongées au centre de l’actualité malgré elles, les deux documentaristes ont l’opportunité unique de suivre une affaire sans précédent qui se développe sous l’œil discret de leurs petites caméras numériques.

Peu intrusives, les nouvelles caméras et les dernières technologies permettent depuis quelques années la réalisation de documentaires sensationnels en haute définition. De The Revolution Will Not Be Televised (2003) à Citizenfour (2014), cette nouvelle génération de documentaires peut ainsi offrir des points de vue uniques, au cœur même d’évènements historiques et en temps réel.

Dans cette même lignée, Making a Murderer va encore plus loin avec un format de série novateur. En dix années de travail, les deux instigatrices ont récoltée une impressionnante collection de témoignages sur l’ensemble de l’affaire Avery. En plus de suivre la famille proche de Steven, elles ont pu suivre tout le procès en direct en accompagnant les deux avocats de l’accusé à travers leur enquête et la construction de leur défense. À cela s’ajoute de nombreuses conversations téléphoniques enregistrées, des vidéos de conférences de presse et d’interviews des principaux intervenants, des archives vidéos du procès dans sa totalité, et surtout des archives de police uniques telles que la découverte en image des scènes de crimes ou encore les interrogatoires filmés des suspects…

Bref, Making a Murderer offre une vision complète sans précédent d’une enquête judiciaire et d’un procès au sein d’une communauté dans son ensemble. Le spectateur bénéficie ainsi d’un recul et d’une compréhension de l’affaire que les participants n’ont pas la chance d’avoir au moment des faits. Une vue d’ensemble passionnante qui met en lumière au yeux du monde entier (via Internet et Netflix) les défauts d’un système judiciaire américain irrévocablement imparfait.

“Ordinary human failings”

 

 

C’est en ces mots que Dean Strang, l’un des avocats de Steven Avery, résume les causes de toute l’injustice dont est victime le présumé coupable de l’enquête. Un ensemble d'”ordinaires défauts humains”. L’avocat accuse ainsi le manque d’humilité du système, qui ne prend pas suffisamment en compte le facteur “erreur humaine” dont peuvent être sujets ses différents acteurs.

Making a Murderer révèle ainsi à maintes reprises les nombreux défauts des policiers, du shérif, de l’avocat commis-d’office, du procureur, du juge… Tout le processus judiciaire se montre faillible face aux erreurs humaines de ses intervenants, et aucune forme de mesures ne semble suffire pour contrôler et réguler ces fautes.

Le documentaire révèle aussi les défauts des hommes impliqués dans l’affaire en dehors du système : les témoins, les médias, les familles de la victime, l’opinion publique… C’est toute la communauté de Manitowoc qui fait défaut à travers des préjugés socio-culturels enracinés dans un manque d’éducation généralisé. Les Avery sont ainsi stigmatisés dès le départ et n’ont à aucun moment une chance d’aspirer à une quelconque présomption d’innocence.

Making a Murderer dépeint ainsi  une société et un système où il suffit d’être accusé pour être coupable. Avec de faibles QI, un manque flagrant d’éducation et de pauvres conditions sociales, Steven Avery et de manière plus flagrante son neveu Brendan Dassey sont les victimes d’une société américaine plus injuste que jamais et ce, qu’ils aient ou non commis les crimes qui leur sont attribués…

Spoilers et actualités

 

Attention, cette partie de l’article concerne l’actualité de l’affaire de Making a Murderer depuis sa diffusion sur internet. On vous déconseille de lire ce qui suit si vous n’avez pas encore vu la série !

Cliquer pour afficher les spoliers de Making a Murderer
 

 

Depuis sa diffusion en décembre dernier, Making a Murderer a fait parler de lui dans le monde entier mais surtout aux États-Unis. Le peuple américain, sensible à l’injustice des condamnations de Steven Avery et Brendan Dassey, ont ainsi remué la toile et les réseaux sociaux pour que justice soit faite.

Une pétition a ainsi dépassé les 100 000 voix sur le site We The People de la Maison Blanche, forçant le Président américain à répondre à la demande de pardon des deux accusés. Une requête malheureusement refusée puisque le Président n’est pas en droit de gracier un criminel dans une affaire d’état comme il l’explique sur le site.

En attendant, tout le monde se prête au jeu de l’enquête amateur et pas mal de théories voient le jour quand au véritable meurtrier. La plus populaire provient d’un ancien agent du FBI spécialisé dans les “cold cases(les affaires classées). Selon lui, le coupable serait le célèbre tueur en série Edward Wayne Edwards, réputé pour piéger d’innocentes victimes et les faire inculper pour ses propres meurtres, et ce depuis l’âge de douze ans… Edwards, décédé en 2011, était surnommé le tueur d’Halloween puisqu’il commettait ses meurtres durant ces fêtes macabres — tout comme le meurtre de Teresa Halbach —. De plus, il aurait habité à une heure de la résidence des Avery au moment des faits.

Mais le dernier développement majeur de l’affaire ne date que de quelques jours. Un internaute a réussi à mettre la main sur une photo de Teresa Halbach le jour de son meurtre. La victime y pose un trousseau de clés à la main alors que la police n’a “trouvé” qu’une seule et unique clé sur le lieu du crime. Pour certains, cela serait une nouvelle preuve suffisante pour relancer un nouveau procès.

Depuis cette nouvelle preuve, une célèbre avocate de Chicago, Kathleen Zellner, vient de prendre la défense de Steven Avery. Elle succède ainsi à Dean Strang et Jerry Buting et compte bien innocenter l’accusé. Ce qu’elle fait savoir à coup de tweets ravageurs sur son compte Twitter. L’avocate a déjà innocenter pas moins de 17 hommes par le passé et fait partie des 100 personnes les plus influentes de Chicago du fait de ses prouesses judiciaires…

Le documentaire 3.0 à l’ère d’internet semble porter ses fruits et l’affaire de Making a Murderer n’a pas fini de faire parler d’elle. Aux dernières nouvelles, Moira Demos et Laura Ricciardi continuent d’enregistrer leurs échanges avec Steven Avery dans la possibilité ouverte et assumée de futurs épisodes éventuels… 

Making a Murderer saison 2 ?

Certainement pas pour tout de suite, mais en attendant, on suit cette actualité de très près…

 

En savoir plus :

  • Disponible sur la plateforme Netflix depuis le 18/12/2015
Emilio M.

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