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Gemma Bovery affiche film cinéma
Affiche du film "Gemma Bovery"

Critique / “Gemma Bovery” (2014) : c’est la France

Dernière mise à jour : juillet 26th, 2022 at 11:30 pm

Posy Simmonds : acte II. Après le bocage anglais, la deuxième adaptation de l’auteur de bande dessinées vient cette fois s’installer dans la campagne française et sur nos écrans, sous la houlette d’Anne Fontaine avec Gemma Bovery. L’avis et la critique film de Bulles de Culture.

Gemma Bovery : une nouvelle adaptation d’une BD de Posy Simmonds

C’est un fait, Anne Fontaine est de loin l’une des réalisatrices françaises — oui d’accord, elle est née au Luxembourg ! — les plus intéressantes du moment.

Bon, dit comme ça et quand on observe le niveau ambiant de nos metteurs en scène hexagonaux, ce serait comme s’extasier qu’une fleur ait poussé dans un marécage, mais force est de constater que, sans être de la même trempe qu’une Antonia Bird ou qu’une Kathryn Bigelow dans une moindre mesure, chaque nouveau film d’Anne Fontaine intrigue de part ses sujets qui ne ressemblent jamais à celui du film précédent et de part la multiplicité des genres abordés.

Tout comme ses consœurs Lucile Hadzihalilovic et Marina de Van, Anne Fontaine n’est jamais là où on l’attend : après le drame familial (Comment j’ai tué mon père), le thriller (La Fille de Monaco) et le biopic (Coco avant Chanel), elle s’attaque cette fois à la comédie légère avec Gemma Bovery, seconde transposition à l’écran d’un roman graphique de Posy Simmonds.

L’auteur britannique avait déjà eu droit aux honneurs du grand écran en 2010 avec Tamara Drewe réalisé par Stephen Frears, avec Gemma Arterton dans le rôle-titre.

Cela tombe bien puisque la belle anglaise reprend du service en interprétant cette fameuse Gemma, jeune insouciante débarquant elle et son mari dans une petite maison de Normandie avec pour principal voisin, Martin, incarné par l’inénarrable Fabrice Luchini.

Il faut sauver Madame Bovary

Dans Gemma Bovery, Fabrice Luchini, en personnage d’ex-bobo parisien reconverti dans la boulangerie et fan devant l’éternel de Gustave Flaubert, va, au fil des rencontres successives, observer de nombreuses similitudes entre l’attitude et les mœurs de ses nouveaux voisins et celles des personnages de Madame Bovary, roman phare de l’écrivain français du XIXe siècle. Pour le meilleur et pour le pire.

Un postulat tout ce qu’il y a de plus simple, très français pour le coup, mais qui permet de donner lieu à de savoureuses situations et quiproquos en tous genres dans Gemma Bovery.

Martin, bienveillant bien qu’intrusif, va tout faire pour éviter que sa nouvelle amie ne connaisse les mêmes aventures, les mêmes déceptions amoureuses et au final le même sort funeste que l’héroïne de Flaubert…

Oui, ça s’appelle “savonner” un livre mais tant pis pour vous, vous n’aviez qu’à bien l’étudier au lycée comme votre prof de français vous l’avait demandé !!!

Une mise en abyme saisissante

Loin d’être une cynique comme la plupart de ses camarades réalisateurs qui auraient traité cette intrigue proche du fantastique — cela aurait pu être le point de départ d’un épisode de La Quatrième Dimension — par-dessus la jambe, Anne Fontaine veut nous faire croire à son histoire et y parvient sans peine.

En jouant habilement dans Gemma Bovery sur la frontière entre les rêves de Martin et la réalité ancrée dans notre campagne bien de chez nous, on s’identifie sans peine à ce boulanger dépassé par les événements et les différentes émotions qu’il éprouve à travers Gemma.

La fascination, le désir, parfois la frustration et la colère de ne pas pouvoir empêcher certains événements d’arriver, Martin apparait au fil de l’histoire de Gemma Bovery comme un écrivain — sans doute celui qu’il aurait aimé être à Paris — qui verrait un roman s’écrire devant ses yeux sans jamais pouvoir en changer l’issue.

Une mise en abyme saisissante qui ne fonctionne que parce que sa réalisatrice y croit et donne envie à ses acteurs d’y croire.

Un casting impeccable

Ce n’est pas un secret qu’Anne Fontaine aime les acteurs, aime les filmer et sait surtout les mettre en valeur. Il fallait bien cela pour que l’alchimie fonctionne grâce à un casting dans lequel la réalisatrice à tapé dans le mille pour chaque rôle de Gemma Bovery.

Fabrice Luchini est toujours aussi impeccable, égal à lui même et en fait beaucoup moins qu’à l’accoutumée. Ce qui nous permet d’apprécier la profondeur de son regard dans certaines scène.

Les seconds rôles comme Jason Flemyng — toujours sympa de le voir — et Elsa Zylberstein sont parfaits en mari désabusé et en bigote insupportable.

Et surtout Gemma Arterton !!

Celle que l’on a découvert en passade de James Bond dans Quantum of Solace, mais qui entre temps a été malmenée par Hollywood et ses blockbusters ineptes comme Prince of Persia ou Le choc des titans, trouve enfin un rôle parfait à sa mesure, à la fois tout en grâce et en délicatesse, et nous gratifie en plus d’un français impeccable mâtiné d’un délicieux accent british qui ferait fondre n’importe quel amoureux de la langue de Molière.

Au sortir de Gemma Bovery, il n’est plus question de se demander si les similitudes avec son personnage et celui de Tamara Drewe ne seraient pas trop grandes pour faire avaler la pilule.

NON, Gemma est Gemma tout simplement.

On espère désormais que d’autres décideurs vont avoir la brillante idée de la faire jouer dans d’autres productions hexagonales.

Notre avis ?

Si l’on peut reprocher à Gemma Bovery un rythme inégal et une fin se terminant légèrement en queue de poisson, on ne peut qu’être captivé par cette charmante partie de campagne aux accents bucoliques.

Comme Gemma, on se laisse emporter par les différentes effluves, couleurs et saveurs de cette histoire qui ne pouvait pas être un meilleur hommage à la cambrousse française.

Si ça pouvait en inciter certains à aller voir ce qui se passe ailleurs plutôt que de se cantonner au 16e arrondissement de Paname…

VIVE LE CALVA !!

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